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xx AVERTISSEMENT.


partie en vers. Mais ces premiers essais ne satisfirent ni M. Watelet, ni ceux de ses amis auxquels il s’en rapporta. On sait avec quelle abondance les fictions les plus ingénieuses sont répandues dans ces deux poëmes ; avec quelle profusion, mais avec quel art, les ornemens y sont distribués ; on sait aussi jusqu’à quel point la langue du Tasse est féconde dans ses nuances, & sur-tout combien les poëtes Italiens du seizième siècle étoient hardis dans leurs inversions : ces difficultés nombreuses, cachées au lecteur par l’agrément de la composition, se montrèrent tout-à-coup à M. Watelet lorsqu’il fallut traduire en poëte ; il vit qu’il devenoit diffus lorsqu’il vouloit être exact ; que les formes des images étoient si délicates & si légères que le moindre changement en altéroit la grace ; qu’en touchant au coloris il en détruisoit la fraîcheur, & il résolut alors de publier non une traduction, mais une imitation de ces deux épopées. Lorsque ces ouvrages paroîtront, l’auteur, qui n’est plus, sera jugé sans doute avec impartialité. On y trouvera plusieurs morceaux dignes de sa réputation & de ses modèles, & l’on répétera ce que M. Marmontel a dit ([1]) en citant la traduction d’un épisode du Dante, par M. Watelet : “Que nul homme de lettres ne fut plus exercé dans l’étude des poëtes Italiens, n’en sentit mieux les beautés, & ne sut mieux les rendre.”

Il faut le louer sur-tout d’avoir bien connu ce qu’il devoit au public, à ses amis, à lui-même. De toutes les pièces qu’il avoit écrites pour différens théâtres, aucune n’avoit encore été imprimée en 1784. Ce fut alors que jugeant, dans le silence de la solitude, ces ouvrages de sa jeunesse, quelques-uns trouvèrent grace devant lui ; il les réunit dans

  1. (1) Poëtique françoise. C’est le tableau du Comte Ugolin, dévorant dans les enfers la tête de l’Archevêque Roger. M. de la Harpe, T. VI de ses œuvres in-8o, 1778, p. 362, parle aussi avec élege du même morceau. le témoignage de ces deux grands littérateurs est si honorable à la mémoire de M. Watelet, que j’aurois cru manquer à mon devoir en oubliant d’en faire mention içi.