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sciences sont nécessaires pour copier le modèle vivant & l’antique. La perspective nous apprend la cause des apparences des corps dans les différentes situations où ils peuvent se trouver par rapport à l’œil qui les regarde, & l’anatomie la cause des formes que prennent les chairs par rapport à la forme des os qui leur servent de soutien, & par rapport à celle des muscles, & à leurs différens mouvemens. Si l’on ne connoît pas les causes, on n’imitera les effets qu’avec incertitude. Ce n’est que dans la science que les artistes doivent chercher la véritable facilité. L’air de liberté qu’affecte l’artiste ignorant n’est qu’une charlatanerie par laquelle il ne peut seduire que d’autres ignorans.

L’élève risquera beaucoup de ne pas dessiner une figure dans ses véritables proportions, si, par exemple, il commence par dessiner la tête pour finir par les dernières extrêmités, sans se faire d’abord une division méthodique. Soit que l’on veuille copier cette figure dans sa grandeur naturelle, ou la réduire à une proportion différente, il faut d’abord tracer la ligne d’à-plomb de cette figure, & ensuite fixer par des lignes ou des points la grandeur qu’on veut donner à l’une de ses parties. La proportion de cette partie servira d’échelle & de point de comparaison pour les autres. On cherchera à estimer à vue d’œil quelle proportion il y a entre cette partie, la tête par exemple, & la poitrine ; quand on l’aura trouvée, on marquera une seconde division, & on suivra cette opération jusqu’au bas de la figure. Quant à la ligne perpendiculaire d’à-plomb, elle servira à s’assurer qu’on ne fait pas perdre à la figure son équilibre, & à remarquer combien les différentes parties s’écartent de cette ligne.

On s’assurera encore de la situation respective & du mouvement des différentes parties, par une opération méchanique, en tenant tantôt perpendiculairement, tantôt horizontalement le porte-crayon, fermant un œil, & mirant ainsi la figure. Il faudra aussi bien remarquer la forme de l’espace vuide que laisse, par exemple, un bras écarté du corps, & à quelle partie du corps répondent le coude, le poignet de ce bras, & marquer cette observation par des points ou des lignes légèrement tracés. Par ces moyens réunis, on peut parvenir à s’assurer des formes avec presqu’autant de précision d’après nature ou d’après une statue, que si l’on traçoit un certain nombre de quarreaux sur un dessin qu’on se propose de copier, & le même nombre de quarreaux sur le papier destine à recevoir la copie.

Si l’on doit copier une composition, on prendra les mêmes précautions pour juger de la correspondance des différentes figures que pour juger celle de différentes parties d’une même


figure. Supposons que la composition ne soit que de deux figures, on examinera à quelle partie de la première figure répond la tête de la seconde, &c.

Enfin, comme dans l’art du dessin, il s’agit moins de montrer de l’adresse que de l’exactitude, on fera bien de multiplier toutes les précautions qui peuvent tenir lieu d’échelle, d’à-plomb, de compas, de quarreaux

Après s’être bien assuré des places qu’occupent les différentes parties en hauteur & en largeur, & les avoir determinées par des lignes & des points, il faut avoir le plus grand soin de ne charger, ni d’altérer le contour en le traçant. Le premier défaut conduit à la pesanteur ; le second à la maigreur, & tous deux sont également graves, puisqu’ils éloignent également en sens contraire de la justesse la plus precise. (Article de M. Levesque).

DÉTACHER se dit en peinture lorsqu’il n’y a point de confusion entre les objets représentés dans un tableau, qu’ils paroissent bien de relief, & qu’ils semblent quitter leur fond, & venir au spectateur. Le peintre doit détacher ses figures. On dit cette maison, cet arbre se détachent bien, sont bien détachés du ciel. (Article de l’ancienne Encyclopédie). Les objets se détachent par le plan, par la couleur propre, par la perspective aërienne, par le clair-obscur. L’art de détacher tient à celui de distribuer. On détache un objet chair, en le distribuant de manière qu’il soit opposé à un objet brun ; on détache deux objets clairs, deux objets bruns l’un de l’autre par la diversité de leurs nuances, &c. (L).

DÉTAILS, (subst masc. plur.) Les petits détails, c’est-à-dire, les petites parties des objets, doivent être négligées par l’art, parce qu’elles ne sont pas même apperçues dans la nature, à moins qu’on ne veuille y faire une attention expresse, & qu’on ne s’en approche assez pour être en état de les examiner. Or, l’artiste doit se tenir assez éloigné de son modèle pour l’embrasser en entier d’un seul coup-d’œil : il ne doit donc pas représenter ce qu’il n’a pu voir lui-même sans trop s’approcher.

L’artiste doit représenter les objets dans leur usage & dans leur beauté.

Pour représenter le corps humain dans son usage, il faut donner aux différentes parties ce qui les rend capables de faire les actions auxquelles elles sont destinées. Ainsi, une main imitée par l’art doit conserver toutes les parties qui lui sont nécessaires pour se mouvoir & remplir ses fonctions : mais elle ne doit pas offrir les petites parties qui ne sont pas les causes de ces mouvemens, & qui en sont au contraire les effets ; telles sont las rugosités que