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Page:Encyclopédie méthodique - Beaux-Arts, T01.djvu/478

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G L S arrêtée sous le glacis, & y forme une croute d’un jaune noir qui donne cette teinte aux parties glacées.

C’est principalement à l’usage fréquent des glacis que beaucoup d’excellens ouvrages doivent la teinte noire qui les gâte.

A ce propos, il n’est pas inutile d’observer que les gens ignorant dans la pratique de peindre & qui se mêlent de nétoyer les tableaux ne savent presque jamais distinguer les parties glacées de celles qui ne le sont pas : d’où il arrive que, voulant enlever tout ce qui leur paroît crasse & saleté dans certains endroits, ils parviennent aussi à tout ôter jusqu’à la première couche exclusivement, qui alors leur paroît être le vrai ton du tableau. Ces endroits cependant, trop crus pour les parties de pâte laissées pat l’auteur sans glacis, ôtent d’autant plus l’harmonie entre les teintes, que les glacis ont été, comme d’ordinaire, placés sur les parties ombrées.

Mais ce point essentiel sera plus amplement discuté dans l’article nétoyage. Revenons à l’art de glacer.

Puisqu’il n’y a point d’autre moyen connu de retoucher les tableaux à l’huile, nous allons nous occuper de présenter les procédés qui nous ont paru les plus raisonnables pour produire le moins de changement possible dans l’ouvrage.

1° Il faut se faire une loi de ne jamais glacer, avec le blanc de plomb ni les autres couleurs minérales, telles que le cinabre, le minium, le jaune de Naples, &c. non-seulement ces couleurs produisent des glacis lourds & dénués de cette transparence qui doit former leur caractère ; mais elles jaunissent & changent de teintes par l’effet de l’air extérieur, lorsqu’elles ne sont pas mêlées avec des terres.

2°. On ne doit pas glacer avec des teintes dans lesquels il entre du blanc ; car l’objet seroit de diminuer une teinte trop brune & ce but ne seroit pas rempli. Au bout de quelques tems, les parties de blanc mêlées avec les huiles & les autres couleurs aquierent de l’épaisseur, & perdent le peu de transparence qu’elles avoient quand on les a posées. Le brun du dessous disparoît, le tableau prend un ton blafard. & devient monotone & plat. Carle Vanloo, dans ses derniers ouvrageS, glaçoit avec toutes couleurs, content de l’effet brillant qu’elles faisoient en sortant de les mains. Cette méthode mal entendue a causé l’étrange changement qui s’est opéré en peu d’années dans le coloris de ses tableaux. On pourroit citer plusieurs autres peintres de notre école qui, par l’emploi des glacis de blanc & autres couleurs lourdes ou minérales, voyent périr leurs tableaux avant eux.

3°. Il est aussi des terres, telles que les ocres, qui glacent difficilement & sans trans-


parence, à moins qu’elles ne soient d’une légereté rare, broyées excessivement & employées avec beaucoup d’intelligence.

4°. Les meilleurs glacis se font avec des couleurs légères, faites de sucs, de résine &c. telles que les carmins, les laques, les stils-de grain, & surtout l’asphalte & mieux encore la munia, composée de résines ; elle se trouve dans le corps des momies & faisoit leur embaumement. On glace encore avec les cendres d’outremer broyées à un dégré impalpable.

5°. Les glacis de stils-de grain, laques, bleu de Prusse &c. noircissent par la nature des couleurs dont ils sont formés ; mais on affoiblit cet inconvénient par les petits soins qui vont faire le sujet de cet article : ils consistent dans le choix des huiles à employer. On employe ordinairement celles qui sont secatives & avec raison, parce que c’est le caractère des glacis de sécher très-difficilement. L’huile appellée huile grasse, est celle qui fait sécher les couleurs le plus rapidement ; mais elle est brune par la nature des drogues qui la composent & par sa cuisson. Ce défaut croît encore avec le tems. Il seroit donc bon d’employer des huiles sécatives blanches, dans lesquelles il n’entrât pas de terre d’ombre & qu’on ne fît pas cuire. Si la saison est humide & qu’on ne présume pas que les glacis sèchent aisément, on peut mêler à cette huile blanche un peu de vernis. Les Flamands en usent, dit-on, en peignant ; & quoique ce moyen paroisse contribuer à la trop grande sécheresse & à faire écailler les peintures, cet accident est moindre que la noirceur que l’huile grasse brune donne à l’ouvrage.

Ces diverses observations pratiques tiennent tellement à l’art des glacis qui est lui-même un point d’exécution, que nous avons été entraînés à les exposer, puisque d’elles dépend l’effet des glacis & parconséquent l’harmonie de tout l’ensemble d’une machine pittoresque.

Concluons par dire que l’usage des glacis ne peut guère avoir un succès solide, que lorsque le peintre l’employe dès la première couche : manière qui caractérise ceux de Rubens & de son école. Les glacis employés par eux sur une impression ou une ébauche vieille & dure, toutes disposées à les recevoir, ont peu changé ; mais aussi quel peintre jaloux d’une grande recherche de formes pourra, sans revenir sur son ouvrage, réunir du premier coup le coloris & l’effet à toutes les parties qui dépendent du dessin ?

Nous avons dit que les glacis s’employoient principalement dans les peintures à l’huile. Cependant il en existe dans la détrempe & dans la gouache, genres dans lesquels plusieurs couleurs, placées au second coup, donnent, par


Beaux-Arts. Tome I. V v