Page:Encyclopédie méthodique - Beaux-Arts, T01.djvu/586

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par lefquels en peut leur donner plus de brillant, c’eft-à-dire , les oppofitions Se les autres artifices que l’art perfectionné met en ufàge , ne peuvent porter l’effet-des couleurs à cet éclat dont .j’ai parlé & dont les hommes ont une idée fans ceffe renouvellée par la lumière du foîeil Se par celle du feu.

Il en eft de même , comme je l’ai dit , de certains accidens des tempêtes ; car ces accidens tiennent de fi près au mouvement &. à des effets fuccefïifs & inflantanés de ténèbres Se de lumière , qu’ils fe refufent ( pour en revenir au iens figuré) à payer l’artifte de fes peines, de fes foins , des frais enfin qu’il fait pour les obferver Se les imiter avec fidélité. Ces objets font donc ingrats Se à l’art Sz à l’artifte.

Venons à l’ingratitude de certains objets, relativement à la deftination que l’artifte fe kpropofe ou qui lui eft impofée. Je me bornerai à une feule fuppofition. Que l’intention du peintre ou de celui qui l’emploie foit de faire naître des fenfations agréables. Si les objets qu’on lui offre à repréfenter y font moins propres , il a plus de difficulté à y parvenir , Se ces objets font ingrats, relativement à la deftination.

Si l’on exigeoit de l’artifte de peindre la Tentation de Saint Antoine, à -peu -près dans le genre de compofition qu’a employé Callor , & de rendre ce tableau aimable , l’artifte trouveroit les monfires fanraftiques qu’il feroit obligé de créer, fort ingrats aux foins & aux peines qu’il prendroit pour remplir, avec leur fecours , la tâche qu’on lui aurait impofee. Tout objet trivial , burlefque ou bas , à plus forte raifon tout objet rebutant , eft donc , pn général, ingrat pour l’artifte, fur -tout fi l’on exige de lui d’intéreffer & de plaire. Ces objets ne deviennent favorables que dans l’intention qu’on auroit d’infpirer la dérifion , de produire le burlefque. C’eft dans ces intentions que font employées les figures bizarres de Callot que j’ai cité ; c’eft ainfi que Hogarth , peintre fatyrique anglois , a d’autant mieux rempli fon but , en peignant les mœurs corrompues Se les ridicules du pays où il a vécu , qu’il a rendu quelquefois ou plus burlefques ou plus rebutantes les actions , les attitudes , les figures enfin qu’il repréfentoit. Ces objets alors , loin d’être ingrats , foit par leur nature , foit relativement à la deftination de l’ouvrage , répondoient aux foins qu’il prenoit de les imiter Se aux frais qu’il faifoit pour les bien fa : fir._ Au refte , le génie eft riche & abondant en effources pour combattre l’ingratitude des objets «.ju’il s’attache à repréfc-n.er, & fouvent on fait un tel gré à l’artifte d’avoir furmonté de grandes difficultés , que ce mérite fupplée à ce I N S !

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qui , d’ailleurs , peut manquer à la perfection de l’ouvrage.

Cette oblèrvation conduiroit à des réflexion* fur ce que la connoifTance ou l’idée des difficultés furmontées ajoute au plaifir Se à l’eftime que font naître les ouvrages des arts ; mais cette matière eft plus curieufe qu’elle ne peut êcre véritablement utile aux artiftes. Il en peut réfulter que les hommes en général ne défirent pas , dans les productions des arts, d’être parfaitement trompés. Ils veulent, comme dans les demi-fommeils , goûter prefqu’àla-Éois le charme de l’erreur Se la fatisfaciion de la connoître.

Cette fenfation compofée augmente le plaifir, lorfqu’elle eft dans une jufte proportion. L’illufion complette feroit d’une efpèce fort différente de cette illufmn mixte dont je viens de parler , Se c’eft certainement cette dernière à laquelle doivent tendre les arts , lorfqu’ils veulent plaire aux yeux Se affe&er l’efprit Se l’ame. C’eft à l’aide de cette illufion mixte qu’on pleure avec délice à l’imitation toujours incomplette d’une action reprefentée fur le théâtre , & même à l’occafion de la repréfentation muette qu’offre un tableau. On n’a point honte de fentir qu’on eft trompé, & l’on fe prête à l’être.

Les artiftes peuvent donc compter fur ce fecours que leur prêtent les fpedateurs , & dont ils ont trop fouvent befoin ; mais ils doivent craindre que , s’ils n’ont pas fait affez de frais pour mériter qu’on les aide , on ne leur devienne contraire.

Je finirai en leur difant : 5) Le mauvais’ choix des objets trop ingrats , eft fouvent l’effet du peu de méditation que vous y mettez, ou de ce que vous comptez trop fur i’indulgence qu’exigent les moyens de l’art.

Le parti plus ou moins heureux que vous pouvez tirer des objets ingrats, dépend de ia méditation, des obl’ervations raifonnées, Se du travail auquel vous devez vous confacrer. Au refte , tout fujet eft ingrat peur le peintre médiocre.

Au contraire, il eft très- peu de fujets ou d’objets abfolument ingrats pour le talent fupérieur. La difficulté donne des force :» au génie Se les ôte au talent foibie.

Je ne dois pas ramener le mot ingrat à fon fens le plus naturel ; mais je dirai cependant que les élèves d’un bon maître font coupables du crime d’ingratitude , lorfqu’ils ne confervent pas pour lui, toute leur vie , les fentimens que des fils bien nés doivent à leurs pères. {Article, de M- Wa tz le t. )

INSCRIPTION, (fubft. fcm.) Phrafe courte qu’on employé quelquefois pour fervir d’explication à un ouvrage de l’arc. On aceem-