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Page:Encyclopédie méthodique - Beaux-Arts, T01.djvu/663

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pierres qui aient naturellement les nuances & les couleurs dont on a besoin, ensorte qu’une même pierre a tout ensemble & l’ombre & le jour, ce qui fait qu’on les taille de différentes figures suivant le dessin qu’on veut exécuter ; c’est en cela que consiste l’essence du pavimentum sectile. C’est de cette manière qu’est fait un très-beau pavé de pièces rapportées de marbre dans le dôme de Sienne ; & c’est de la même façon : qu’on fait présentement à Paris, aux Gobelins, des tables de pièces rapportées de marbre, de lapis lazzuli, de jaspe & de plusieurs autres pierres précieuses.

Suetone, dans la vie de Jules-César, parle de ces deux sortes de pavés, que Jules-César faisoit porter avec lui à l’armée, pour les faire promptement accommoder dans sa tente. In expeditionibus tessellata & sectilia circumtulisse. Sur quoi on peut consulter le commentaire de Casaubon, qui fait plusieurs remarques curieuses sur ces pavés, & sur leurs noms grecs & latins. Il en fait une entr’autres sur le mot lithostroton, qui est le lieu ou fut mené Jesus-Christ pour être jugé par Pilate. Ce mot signifioit un pavé de pierres taillées ou rapportées, tel qu’étoit la salle du tribunal que les Juifs appelloient en leur langue gabbata.

On trouve de ces pavés de marquetterie presque dans toutes les villes anciennes, & particulièrement dans celles qui ont été des colonies romaines. Mais on prend rarement le soin de les conserver dans leur entier.

En 1677 dans Avanches qui est une des plus anciennes villes des Suisses, on en trouva un, où il y avoit plusieurs figures d’oiseaux & des compartimens, avec ces lettres écrites dans le milieu :

Pompeiano et avito
Coss. kal. ian

Ce qui marquoit que ce lieu, où apparemment il y avoit eu quelque temple, avoit été dédié un premier jour de janvier, sous le consulat de Pompeianus & d’Avitus qui entrerent en charge l’année de notre ére 210 & de la fondation de Rome, 961 selon les fastes du capitole. Mais ce pavé a été tout gâté, &, sans le soin de quelques curieux, on en auroit même perdu le souvenir.

Berger, dans son histoire des grands chemins, décrit un pavé de mosaïque qui est dans l’église du monastère de Saint-Remi de Reims, où se trouve la Sainte-Ampoule &c.

Jean Poldo Dalbenas, dans ses antiquités de Nismes, fait mention du pavé de mosaique qui se voyoit de son temps dans l’église cathédrale de Nismes, & qui representoit des figures d’arbres, d’oiseaux & d’autres animaux, de-même qu’un autre qu’on avoit transporté de Saint-Gilles proche de Nismes à Fontainebleau ; ce qui l’oblige à parler assez au long de ces sortes de pavés. Il dit qu’on les appelle en France mosaïque, ou mosaïque, se servant indifféremment de ces deux mots selon l’usage de son temps. Il remarque, que dans le code livre X. titre de excusat. artif. Les empereurs Theodose & Valentinien dispensoient des charges publiques les ouvriers de mosaïque, musivarios : que Ciceron, dans son Brutus, parlant du style de Marcus Calidius, dit que ses expressions étoient composées & rangées comme les petits quarrés de l’ouvrage vermiculé.

Les mosaïques devinrent si communes à Rome, que les Papes en firent faire dans une grande partie des églises, comme nous l’apprend le bibliothécaire Anastase : il dit que Léon IV. en fit faire dans l’église de Saint-Pierre, Sergius II. dans celle de Saint-Martin, Grégoire IV. dans celle de Latran ; & que ces mosaïques étoient dorées en quelques endroits, comme on en voit encore en Italie : c’est ce qui fait une des beautés de l’église de Saint-Marc à Venise.

Spartien, dans la vie de Pessennius Niger, dit que cet empereur, n’étant encore que particulier, étoit si particulièrement aimé de Commode qu’il étoit peint dans les jardins commodiens entre les amis de Commode, dans une voute de mosaïque, portant en procession les mystères d’Iris : in porticu curva pictum de musivo.

Voici une inscription que le cardinal de Medicis a fait apporter de la côre d’Afrique proche Tunis, à Florence, & qui parle d’une mosaïque dont une voute étoit embellie.

……Ata pecunia perfecit.
et dedicavit et ob dedicationem.
pugilum cfrtamina edidit.
et décurionibus
sportulas et populo gymnasium epulum dedit.
et hoc amplius pro sua liberitate cameram
super posuit et opere museo exornavit.
…cum…aréis.. felice et rufino
…ded…ob. quam dedicat.
epul. dec. et populo frum. ded.
coss. kal. ian

Cette inscription fait mention de quelque bâtiment pour la dédicace duquel on avoit donné des combats de lutteurs, des présens aux decurions, & un festin au peuple : & à cet édifice on avoit ajoûté une voute ornée de mosaïque sous le consulat de Félix & Rufinus.

Il y a apparence que ces mosaïques étoient communes à Lyon ; car on marque que dans l’église d’Enay tout le pavé près de l’autel étoit en mosaïque. Le pape Pascal II. qui rebâtit cette église, y est représenté avec ce vers :


Hanc œdem sacram Pascalis Papa dicavit.