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P A Y à tout ce qui tient à la nature, dédaignent moins que les gens du monde,

Voilà une partie des richesses que la nature du pays & des habitans dont je parle a prodiguées à des Artistes dont le caractère national est à l’égard des Arts, la patience, le goût de la propreté & de la vie sédentaire.

Aussi plusieurs ont-ils vécu séparés les uns des autres dans le lieu qui les a vu naître & dont la plupart portoient le nom. Ils n’ont point eu d’Académies fondées & célebres, comme l’Italie & la France ; mais leurs beaux & nombreux ouvrages déposés & conservés dans les collections des négocians enrichis, ont constitué ce que l’on nomme l’école nationale ou Holandoise.

Les artiste trouvoient donc, dans presque toutes les villes, quelques cabinets dans lesquels de bons tableaux de tous genres leur indiquoient les différentes routes de l’imitation. La nature se chargeoit de poser autour d’eux sans cesse le modèle.

Vouloient-ils imiter des animaux ? Ils en appreçevoient de leurs fenêtre dans toutes les attitudes qu’ils pouvoient desirer. Vouloientils connoître & représenter les effets des eaux & peindre des marines ? Pour peu qu’ils se transportassent d’un endroit à l’autre, ils avoient les spectacles les plus variés de ce genre : ils pouvoient, en navigeant, faire des études de tous les accidens de lumière & d’effets que présente une multitude de barques, de vaisseaux, de ports, de rades & de canaux. Dans les villes ils trouvoient pour monter leur coloris, un mélange heureux de bâtimens de brique, d’arbres, de verdure, de voiles, de ponts pittoresques qui, se reflétant dans les eaux, leur présentoient partout des tableaux composés richement, & brillans par la variété de la couleur.

La Hollande est donc le pays où naturellement doivent se trouver en plus grande abondance les paysagistes du genre mixte ou des vues composées, & dans lequel ils ont eu plus de secours pour ces sortes de tableaux. Il reste à parler des représentations idéales de la nature champêtre.

Des réprésentations idéales de la nature champêtre.

Il faut nous transporter en Allemagne, en France & surtout en Italie, pour nous faire une juste idée de ce genre.

Dans ces climats, les artistes de la peinture n’ont pas vécu à part comme en Hollande ; ils n’habiterent guere les compagnes, & d’une autre part, les modèles champêtres se trouvent dispersés de manière qu’il est besoin pour en faire usage, de les chercher, de les choisir.


Mais si nous nous arrêtons principalement à l’Italie, nous verrons premièrement que les aspects y sont généralement plus pittoresques & d’un caractère plus élevé que les sites de la Hollande : secondement que les esprits dans ce climat plus chaud, y sont aussi plus en mouvement que dans les plaines & les prairies Belgiques, & enfin qu’une transmission continuelle d’idées qu’inspirent la poësie, la musique & généralement tous les arts libéraux, porte sensiblement l’imagination vers le beau idéal. Ainsi les peintres de figures s’y sont livrés la plus part au genre héroïque & les paysagistes aux compositions de génie.

D’un autre côté, le caractère national qui porte aussi, dans les pays dont je parle, les hommes au goût des spectacles, des fêtes, par conséquent à des réunions, a conduit les artistes à former de nombreuses & célèbres écoles ; enfin l’émulation fort naturelle enture plusieurs petits états séparés, & un nombre d’artistes réunis, a excité leurs efforts & contribué à des succès distingués.

D’après ces observations générales, sur lesquelles il ne m’est pas permis de m’étendre, dans cet ouvrage, les sites dont les paysagistes Italiens se sont rempli l’imagination doivent être un mélange des grands aspects qu’offrent leurs pays & des fabriques intéressantes qui les embellissent ou qui les ont jadis embellis, restes imposans qui attestent la vérité des récits qu’en font les historiens & les poëtes. Les montagnes, les torrens qui s’y précipitent, les belles collines, les lacs, les vallées fertiles, ont dû naturellement faire la base des paysages Italiens ; les fabriques nobles, les temples, les monumens antiques & ruinés, ou modernes & majestueux, fournissoient les accessoires.

C’est donc là que devoit s’établir, dans toute sa pompe, l’idéal champêtre, & c’est là qu’ont dû se montrer, & que se sont montrés en effet plus nombreux les artistes de tout genre. Le reste de l’Europe, sans excepter la France, a reçu de l’Italie les germes qui ont produit les arts. Depuis cette époque on n’a pas cessé d’aller, comme en dévot pélerinage, renouveller ces semences, d’autant plus précieuses qu’elles sont plus sujettes à dégénérer sur les sols étrangers.

Par ces soins, le genre héroïque de l’histoire & le genre du beau paysage idéal, nous ont été transmis.

Mais comme le caractère du climat qui influe sur les sites, influe encore sur les idées, les usages & les occupations de ceux qui l’habitent, il en est resulté des diversités très remarquables entre les écoles & on général, entre les ouvrages des peintres d’Italie & ceux de nos peintres.