Page:Encyclopédie méthodique - Beaux-Arts, T02.djvu/195

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entrent dans les palais, la voûte leur montre quelle forte de héros les ont conftruits, les ont habitas & de quelles aftions ils ont étécapables. Dans les laies de théâtre, on lit la nature des Ipeâacles auxquelles elles font deftinés ; on y voit que leur but eft d’attendrir, ou de recréer & toujours celui d’inflruire. En-’ fin dans les temples, la tâche de la peinture fur les arcs des Nefs , ou fur les coupoles , eft de nous dire de quel vertueux immortel il faut admirer Iss prodiges, ou imiter les vertus ; & de quel Dieu il faut fuivre la loi & : refpeSer le fanâuaire.

^ Un plafond bien entendu préfente le mou-

! vement 6c la vie dans toutes les parties d’un 

intérieur qui , £àns lui , n’ofFriroit fouvent qu’une vafte folitude. Ce genre de peinture efi comme une couronne ajoutée à tous lesembelliflements de l’art de bâtir ; ou , pour s’identifier encore davantage avec lui, comme une peau brillante qui, par fon éclat, anime les formes les plus régulières de la beauté. Un habile Architeûe , furpris par les fophifraes qui veulent chaffer notre art des voûtes, ne feroit-îl pas ramené par les images que je viens de raffembler ? Eh comment y réfifleroit-il ? Ces images & ces raifons frappent également le jugement & les fens. -En effet , de quelles armes pourroient fe fervir les détradeurs de la peinture des plafonds pour détruire tout ce que nous venons d’avancer ? Uferont-ils delà raifon quon ne doit pas repréfenter le ciel à découvert dans un endroit fermé. Mais fans leur parler de l’efpece de ciel que leur préfente la peinture, ce qui nous ranieneroit encore à ce que nous avons dit au commencement de cet article & au mot peinture , copions , (i) , un écrivain fur l’architefture -, voici ce qu’il ■leur répond : a Ils n’ont pas confidéré que le » ceintre de la voûte étant l’imitation de la courbe que le ciel décrit fur nos têtes, rien n’efl » moins contre la nature que de rendre cette » imitation encore plus fenfible par les objets » qu’on y repréfenter. Ajoutons, que ce qui fe dit ici des voûtes & des ceintres, peut fe dire aufli de tous plafonds.

Ainfi. que les fameux conftrufteurs , que ces hommes de génie, qui parleurs nobles conceptions tiennent tant à l’art du Peintre d’hifloire, reviennent auprès de lui. Ou difons mieux, qu’ils l’accueillent, qu’il lui donnent un magnifique abri & qu’ils adoptent les fpedacles enchanteurs qu’il leur ofrre ; qu’ils ne produifent rien de grand, d’imposant, d’inflruâif & d’attachant qu’en s’alliant avec les charmes du fentiment dont la Peinture eft la difpenfatrice. [.— ^ ^ ^

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Alérs, en comparant un monument dont elle aura ete exclue avec celui oii ce qu’elle a d’artraits aura été fagement employé, ils conviendront qu on acompletté, dans celui-ci, la réunion desbeautés qui doirenrconcourirà ’a fplendeur &a l’élégance dc-s édifices, & queues Architeftes qui, dans l’autre, ont adopté le fyftême contraire, ont laiffé des places comme vuides quoiqu’ils les ayent décorées d’ornemens en iculpture qui par leurs répétitions & de formes & de couleurs, deviennent toujours infipides,& que par ce dénuement , ils n’oifrentrien de flatteur à 1 efpnt de l’homme fenfible.

Mais à quoi bon accumuler les preuves & les argumens contre les froids raifonneurs qui tendent a feparer l’aimable Peinture de l’utile & favante Architeûure. Oppofons-leur les opinions , 1 autorité des plus illuftres Architedes. depuis Brunellefchi , Bramante , VignoJe, Phihbert de l’Orme, jufqu’à Lunghi , Borominî , I Juvara, Cartaud, Evrard, Boffiand, & nos fa- . meux Maniards. Développons à leurs yeus les peintures des édifices élevés par ces Maîtres immortels auxquels on ne peut refufer le bon goût Montrons-leur Ies/,/^/c„^, & les voûtes del’Eglife de Todi , du Palais-Caprarole , du Jefus , des Saints-Apôtres , de la Chiefa nova , du Palais-Pmi, des Tuileries, de Fontainebleau, 1.= / PM^’f^’ ^^ l’Affomption, de Verfaill es , de l’Hôtel Crofat , des Invalides & de ttsus les autres monumens où l’on voit briller les talens de Zuccharo , de Pellegrino , Tibaldi , de i-nmatice , de Lanfranc , de Baccicio , de Piètre de Corconne, de Vouer, dePerrier, de Bourdon, de le Brun , de le Sueur, de Mignard, de Jouvenet, des Boulogne & de la Foffe. Si les 1 eintres àe plafonds que je rappelle ne produilent pas tous , dans un égal degré, les effets merveilleux qu’on doit attendre de leurart,au moins conviendra-t-on que les plus grands architeftes en goutœent &en follicitoient l’emploi dans les occalionsles plus importantes.

Maisneus voici parvenu à examiner de quelles méthodes on doit ufer pour féconder l’architec ture par l’ornement à^s plafonds , & à traiter de la nature des fujets, & du genre de peindre qu’il y faut employer. ’^ ^

D’après le principe que nous avons pofé contre tous les projets d’illufion en peinture , & d’après 1 étendue que nous donnons à ce bel art on fent que nous ne reftreignons pas aux feuls lujets celeftes & aériens ceux qui peuvent fe faire voir dans les plafonds. Ainfi nous réprouvons l’opinion de l’Abbé Laugier (* ) qui n’admet que ces fortes d’objets & qui ne veut ni terrafes, ni montagnes, ni fabriques , ni ri- (i) L’Abbé Laugier.

Biaux-Arts, Tqvh II.

U) V. obferv. fut l’architeaure , p. 250,