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pouvons pas fuppofer une grande connoîffance delaperfpcaive, ayent décelé les principes de ces raccourcis dans leurs plafonds. Les figures y fonc placées comme fur un champ qui pourroit être vertical ; Raphaël n’a pas fait d’autres efforts pour fes plafonds : nous en pouvons juger par les tableaux qui fevoyent aux voûtes des loges du Vatican, (i) Mais cette négligence j fi ce n’efl : pas un défaut defcience, efl : rendue excufable iorfque le peintre donne à penfer que c’eft un tableau qui efl : attaché à la voûte, ou bien une tapifferie, comme Lebrun l’a fait à l’hôtel Lambert. Alors l’oeil n’en eft pas choqué, & c’eft un point très-exigible en toutes fortes de peintures, prœvaleat enfus rationi ( x ). Cependant ce qui a pu n’être pas familier à Raphaël & à quelques uns de l’on école , n’a pas tardé à être pratiqué très-peu de temps après. Nous voyons même q-uelques raccourcis de Jules Romain. Rien ne plafonne mieux que la coupole de Parme, ouvrage immortel du Corrége , & que les figures de Pellegrino Tibaldi à l’inftitut de Bologne. Plufieurs iei plafonds de la galerie deDiane, à Fontainebleau , font pleins de ce fentimont de perfpedive, & prouvent , ainfl que les ouvrages que nous venons de citer , que ces grands maîtres nous ont laifle dans ce genre lavant & animé , des modèles que les modernes n’ont pas encore atteints.

Il eft une manière heureufe & bien ufitée de décorer de peintures une voûte , en la divifant par des ornements fages , quand elle fift trop vafte & trop peu élevée pour que le regardant puifTe joui/ de fon enfemble. C’eft dans ces divifions qu’Annibal Carrache , le Cortonne , le Brun & même Coypel ont montré tant de goût & d’imagination. Mais le peintre , dans le choix des membres qu’il place fur la voûte , doit être bien exad à fe concilier avec l’ordre & les ornements employés [i] Cet exemple de Raphaël a été imité par Mengs dans fon plafoiii de la Villa- Albani ; s’il a pris ce parti , ce n’a pas été par ignorance de la perfpeûive, mais par un raiîonncment que quelques-uns ont approuvé , que d’autres ont blâmé fortement. Voici comment s’exprime , àcefujet,M. le chevalier Azara, auteur de la vie de Mengs , & qui ayant été lié intimement avec lui , a appris de fa bouche les motifs de fes opérations. « Il fie , dit il, ze plafond comme » (î c’eût été un tableau attaché au plancher, parce qu’il M avoit reconnu l’erreur qu’il y a d’exécuter ces fortes 5> d’ouvrages avec le point de vue de bas en haut , ainfi 3j que c’eli l’ufage des .-nodernes , à caule qu’il n’est pas sï • poflible d’éviter de cette manière les raccourcis défagtéables qui nuifent nccefTairejnent à la beauté des formes. X- Cependant , pour ne point heurter abfolument de front » la méthode reçue de nos jours, il fit deux tableaux collatéraux, fur chacun defquels il n’y a qu’une feule figure j a»’ repréfentée en raccourci , dans le goût des artistes mojs dernes »=. ( Nott du RédaSeur. ) .{2] Diïfrenoy.

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ipar l’archîtefle fur les parois de la pièce dont la partie fupérieure eft confiée à fon génie. ■i Si, comme nous l’avons dit plus haut, les peintres antiques ne nous cnt pas donné de preuves qu’ils connuffent ni les raccourcis des objets fi heureux dans les plafonds, ni les grandes fcènes pittorefques qui s’y peuvent développer, quels hommages ne devons nous pas aux chefj ;d’œuvre que nous offrent les débris décombrc’.s de leurs édifices, & par quelles leçons n’ali» ment.°nt-ils pas notre goût ? Ici nous avons deffein de diriger les regards de nos ledeuis fur ce qui nous refte aux murs & aux voûtes des ruines des bains de Titus. Ces fragmens précieux Cont loin de nous fans doute, mais nous pourrons profiter de ce qu’ils ont de plus utile, (avoir des penfées ,& : des motifs , par la colleélion qu’on vient d’en graver avec tant de fuccès. (i) C’eft là que nous pourrons juger de toutes les reffburces d’une aimable & abondante imagination, & étudier les moyens heureux d’orner de petites pièces avec légèreté, avec élégance , avec grâce & de la manière la plus voluptueufe. Si dans notre article fur les grottefques , nous avons trouvé que ce genre plus élégant que noble , étoit toujours déplacé dans des lieux graves, fpacieux & fufceptibles de ce que l’art a de plus grand , combien ne fentons nous pas les avantages de ces produftions enchantereffes pour des lieux deftinés aux feftins, au repos, aux bains & même au filence du cabinet. C’efl par des détails femblables aux arabefques que nous citons, qu’on peut embellir des plafonxis bas & de médiocre étendue, parce que l’œil peut en parcourir à loifu- , & les petits tableaux , & les ornemens vifs & légers qui les encadrent. Dans le nombre des obfervations que nous avons faites fur l’art de décorer les voûtes , il en eft une que nous voulons communiquer à nos leéleurs. Elle peut être de quelque défavantage aux peintres, mais elle fera utile à l’effet de l’architefture & de la peinture. Or notre defir principal feroic de travailler pour les progrès des arts. Nous voulons parler ici de l’attention à ne pas trop multiplier les peintures dans les intérieurs. La voûte de la chapelle de Verfailles, par exemple, en paroît ’ trop chargée à tous les hommes de goût. Les divers fujets qui y font rafTemblés y produifent de la confufion. Il eft donc eflentiel , Iorfque l’architecte ne peut faire entrer, faute d’efpace , aucun ornement réel de fculpture, d’en fuppofer de feints, & de repoler ainfi l’attention du fpeflateur par des divifions fa- [I] Bains de Titus, de Livie , &c. par M. Ponce, traveur.

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