Aller au contenu

Page:Encyclopédie méthodique - Beaux-Arts, T02.djvu/392

La bibliothèque libre.
Cette page n’a pas encore été corrigée

582

s c u

la fculptun a toute la nature pour objet d’îmîtation, &. que la nature a des beautés de plus d’une efpèce , pourquoi un fculpteur s’aflerviroit-il à une feule manière de draper, employée félon les temps, les climats & les circonftancps /

Les grands fculpteurs modernes , tels que François Quenoi, Puget , Alegarda, Rufconi , Le Gros, Angelo-Roin , Sarrazin , &’ Bernin quelquefois, tonc voir quelles beautés les étottes larges & jftttées de grande manière, produifent dans la l’culptute. Les anciens fculpteurs le font voir aulFi , mais rarement : enlbrte pourtant qu’on pourroit faire la critique du gpûc exci ufif des petites draperies antiques, par des draperies larges du même tems, comme celle du Zenon au Capitole , celle de la petite Flore du même palais, dont les plis font ordonnés avec la chaleur des plus brillantes étoffes ; celle du Sardanapale, au ^/i/œj^m Clémentin, Se celle de Marius, à la Fitla Negroni. Dans les obfervations que l’on pourroit faire fur les draperies des anciens, il ne faut pas confondre le travail avec l’ordre & ; le choix des plis. Si le travail en eft quelquefois fans goût, fans intelligence & fans vérité, l’ordre & le choix en font prefque toujours favans , & propres à donner les plus fublimes Irçcns.On voit dans la belle copie d’après l’antique , faite par Le Gros , aux Tuileries, l’effet que produifent les draperies antiques, lorfqu’elles font traitées dans le vrai de la nature. Tous les artiiles qui ont vu l’original de cette figure, lavent jufqu’à quel point fon exécution eft inférieure à la copie ; mais entre les mains d’un grand flatuaire , nous voyons ce que deviennent les plis antiques. La belle exécution des figures de la Fontaine des Innocens, montre encore l’emploi heureux qu’on en peut faire. Ces figures font des Nymphes , & cette forte de draperie leur convient.

Ofons avouer que les anciens ont fouvent négligé l’étude de cette partie ; mais ils perdent peu de chofe en comparaifon de ce qu’ils nous ont laifle à admirer. Aucun fcuipteur ne doit Ignorer aujourd’hui, que le cifeau réuffit très-bien dans la variété du travail que demandent les ’ différentes étoffes. Quelles qu’elles f-ient , obfervons que l’elpace & la quantité des plis ne foient pas égaux ; que leur faillie oc leur pro fondeur, qui produifent les ombtes, foient harmonieui’ement cariées : fans quoi l’œil fera fatigué d’une monotonie, telle qu’on la remarque t dans les draperies de la Fiimille de Niobé , où ftatues antiques de femmes vêtues d’étoffes de laiac, que de ftatues aipiftées de draperies légères , & qu’on y . reconnoit aifément le drap à l’ampleur Si à U lucltuie de fes plis. ( Heu du Rédacisur, ) S C U

les plîs, fans intelligence dans la dîftrîbutîon^ fans vérité dans l’exécution , fontaflez femblables à des cordes , des copeaux , ou des écorces infipidement arrangées. L’harmonie pÙ aufli néceffaire dans Izfculpture, que dans la mufîque : les yeux ne font pas plus indulgens que les oreilles (i).

Que les plans de chaque pli foient donc difpofes de manière à ne produire aucun angls aigu de lumière ou d’ombre, qui en fe découpant durement, choqueroit la vue, détruiroit le repos des chairs ; & femblable aux figure» Gothiques, ne préfenteroit que desdétails défunis : défaut qui affoiblit , étouffe même les beautés réelles d’un bon ouvrage. Mais il faut profcrire les draperies voltigeantes ; elles interrompent l’union , divifent l’intérêt, fatiguent l’œil, & empêchent de voie l’objet principal : excepté pourtant les fujets 8c les adions où elles doivent être néceflairement agitées , comme Ja chute d’Icare , Apollon pourfuivant Daphné, &c. Alors , traitées avec beaucoup d’art tk de légèreté, ces draperies ajoutenc à l’intérêt & à la vérité de l’adion. Dans un bas-relief, elles s’eniploient aufli avec fuccès pour étendre des lumières & des ombres, lier des groupes, & fervir utilementà l’agencement d’une compofit’on. Mais fi elles font traverfées en fens contraire par une multitude de caffures, comme on en voit dans quelques ouvrages de Bernin, alors elles ont l’air de rochers, & détruifent abfolument le repos & l’accord.

Si ces principes font fondés fiir le goût & fur la nature , il en réfulte qu’un fculpteur en les fuivant, pourroit s’élo ener de quelque fyftême particulier. Mais que lui importe.’ li doit l’avoir que dans les arts , la recherche du vrai ne connoît point d’autorité particulière. Qu’il ait le courage de travailler pour tous les tems & pour tous les pays.

J ai dit que l’ordre des plis antiques eft propre à donner les plus fublimes leçons. Il faut donc, pour fe former le goût de dtaper dans les meilleurs principes, confulrer les draperies antiques, telles qu’elles font exécutées, préférablemenl : à certaines draperies modernes, plus larges & moins froides en général. Cette étude doit être même regardée comme auffi néceffaire pour le drapé , que l’étude de l’écorché pour le niid.

Ces principes, une fois reconnus, font ap- (i) Vitruve nous conte fort férjeufement , que les caBeluies furent ajoutées- aux colonnes , pour imiter les plis des robes que poitoient les dames : TruncC que Toto jtrias , ati Jlolarum rugas , manonali more dimiferunt , 1. 4 , c !. Les ftatuaires l’ont bien rendu aux architeâes, quand ils ont fait leurs plis femblablçj aux cjuelmcs des çoloanes, ( Note de l’Auteur, )