Page:Encyclopédie méthodique - Finances, T1.djvu/112

La bibliothèque libre.
Le texte de cette page a été corrigé et est conforme au fac-similé.
27
AID

Ce qui vient d’être dit pour le vin, pourroit de même avoir lieu à l’égard de l’eau-de-vie & du cidre. Quant à la biere, comme les brasseries consomment une grande quantité de grains qui pourroit être plus utilement employée, & que la consommation de cette liqueur nuit à celle du vin, il seroit à propos de régler le droit qui se paie à la fabrication, en raison de la valeur des grains, au mois de janvier de chaque année ; ensorte que dans les années abondantes le prix de la biere se trouvât augmenté d’un tiers ou d’un quart, & que dans les années de disette le droit fût assez fort pour empêcher de brasser.

Quant au commerce du dehors, il doit être favorisé autant qu’il seroit possible, en le débarrassant de toutes les entraves auxquelles il est assujetti, & en réduisant les droits de sortie, tant par terre que par eau & par mer, à un droit uniforme & modique. La maxime fondamentale du commerce, est de procurer, par toutes voies, l’exportation des denrées du cru qui sont surabondantes, & celles de l’industrie, avec la précaution d’écarter tout ce que l’art & la nature donnent à ce même état en quantité suffisante.

Aussi-tôt qu’une denrée ou marchandise est poussée au-delà de sa valeur naturelle, par l’effet des impôts ; la consommation cesse ou diminue sensiblement, & le produit de l’impôt ressent le même coup. On ne sauroit dont avoir trop d’attention à entretenir cette juste proportion, sans laquelle le commerce ne peut subsister. Les cultures s’affoiblissent. Les revenus de la nation diminuent dans toutes les parties, parce qu’elles ont entre-elles une liaison intime & indissoluble ; la richesse du prince s’anéantit, parce qu’il n’en a pas d’autre que celle de ses sujets.

La législation de la partie des aides, est fixée par l’ordonnance du mois de juin 1680, qui a été suivie de plusieurs réglemens interprétatifs. Les principaux sont les édits de septembre 1684, décembre 1686, la déclaration du 4 mai 1688, pour le droit de gros.

La déclaration du 10 octobre 1689, les édits de février 1704, & octobre 1705, pour la jauge-courtage, les droits d’inspecteurs aux boissons & aux boucheries ; celle du 23 octobre 1708, pour les droits de courtiers-jaugeurs, &c. Voyez chacun de ces mots.

Un écrivain très-estimable & très-instruit, a donné sur la législation des aides, & notamment sur l’ordonnance de 1680, des observations qui peuvent être utiles lorsqu’on s’occupera de la modification de cet impôt. C’est un motif pour les consigner ici. Recherches & considérations, sur les Finances, par M. de Forbonnais, édition in-12, 1753, tom. 3, pag. 146.

Les divers droits d’aides furent simplifiés & même réduits de quelque chose. C’étoit un grand avantage sans doute ; mais l’opération ne fut pas complette, parce qu’on ne corrigea pas la diversité de l’impôt entre les diverses généralités, entre les élections même & les particuliers.

L’origine de ces différences vient de ce quelques-uns des droits avoient été rachetés dans certains cantons. C’est une justice sans doute de les faire jouir d’un engagement contracté avec eux, mais il n’en est pas moins vrai que les communications souffrent de cet embarras, & que les loix uniformes sont toujours utiles à l’état en général.

Seroit-il donc injuste d’examiner comment ce rachat a été fait ? Si c’est par l’établissement d’une autre imposition, comme il en est peu dont la répartition soit plus égale & plus douce que dans celui-ci, s’il est modéré & si le commerce étranger n’en souffre pas, il ne sembleroit point impossible de revenir contre ces compensations.

Si le rachat a été fait moyennant une somme d’argent, il ne paroît pas juste qu’il soit perpétuel. Le prince a toujours la faculté de rembourser ou de faire rembourser par ses fermiers, en leur abandonnant pour un tems la jouissance des droits.

Il semble qu’on en pourroit dire autant des privilèges particuliers, toujours accordés aux riches. Rien de plus contraire à l’esprit de la justice distributive, qui est le premier devoir des législateurs, l’ame & le lien des sociétés.

L’augmentation des produits ne seroit pas le seul avantage d’une exacte uniformité d’imposition entre les provinces & les sujets ; elle mettroit tous les lieux & tous les concitoyens dans un équilibre naturel pour le commerce, pour la vente de leurs denrées, & pour leur contribution aux charges publiques.

Il se présente de puissantes objections contre ce systême, & il est très-douteux que cette uniformité de droits sur les vins, fût généralement avantageuse. Si le droit étoit fixé par muid, seroit-il juste que les vins qui par une qualité supérieure sont susceptibles d’un grand commerce extérieur, ou destinés à la consommation des riches, ne payassent que le même droit que les vins dont la qualité médiocre exige qu’ils soient consommés dans la province, sur le territoire qui les a produits ?

Si le droit est réglé par la valeur du vin, quelle source intarissable, de difficultés pour le percepteur, de fraudes de la part du redevable… Voyez ci-après au mot Alsace, combien l’uniformité d’impositions dans un état aussi étendu & aussi varié que la France dans ses productions, peut entraîner d’inconvéniens. Voyez aussi Droit de Gros.

L’ouvrage que nous venons d’analyser, présente ensuite des réflexions très-fondées, sur l’effet de quelques réglemens, en matieres d’aides, nuisibles au commerce des vins en Normandie.

Il semble que l’on ait étudié les moyens d’empêcher la sortie des vins de cette province pour l’étranger. Au Havre, les droits sont les mêmes sur des vins qui y restent ou qui passent debout. A Rouen, l’ordonnance les assujettit à cinq livres quinze sols onze deniers en passant debout, sans