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DISCOURS
PRÉLIMINAIRE,
OU
ESSAI HISTORIQUE
SUR LES FINANCES.
Par M. Rousselot de Surgy, Ancien Premier Commis des Finances, de l’Académie des Sciences, Arts & Belles-Lettres de Dijon, & Censeur Royal.

Lorsque Tacite dit que le repos des nations ne peut être assuré que par les armes, que les armes ne peuvent être entretenues que par des dépenses, que les dépenses enfin sont fondées sur les tributs ; cet écrivain profond nous indique à-la-fois le prince & la fin des finances[1]. Sous le nom de finances, on comprend toute espèce de deniers publics, & le pouvoir de les lever est un des attributs de la souveraineté ; mais comme un prince & tout homme qui commande à d’autres hommes, doit se proposer pour objet leur utilité & leur bonheur, son premier soin dans la levée des deniers publics est d’user de modération, & d’établir une juste proportion entre les facultés & la contribution des sujets de l’Etat.

Les grandes exactions diminuent les revenus publics, quoiqu’elles semblent d’abord les augmenter ; elles en tarissent les sources, détruisent l’agriculture & le commerce ; elles excitent les plaintes, & finissent par enfanter des troubles & des révolutions[2].

L’objet le plus essentiel de toutes les sociétés politiques, est donc de régler les impositions de maniere qu’elles ne soient onéreuses à personne ; car c’est moins encore le poids de l’impôt que l’inégalité de sa charge qui chagrine & révolte. Que chaque individu contribue, dans une proportion mesurée sur ses forces, à donner de la vigueur au corps politique dont il est membre ; c’est ce concours d’intérêts & d’efforts qui fait la sûreté de l’Etat, assure la propriété particuliere de chacun, & maintient l’exécution des loix établies pour la tranquillité générale. Les exceptions, les privilèges, toujours en faveur des riches, sont un mal d’autant

  1. Nec quies gentium sine armis, nec arma sine stipendiis, nec stipendia sine tributis. Hist. lib. 4.
  2. Personne n’ignore que l’indépendance que le continent Américain vient d’acquérir si glorieusement, tire son origine de l’acte du timbre, qui, en 1764, défendoit d’admettre dans les tribunaux tout titre qui n’auroit pas été écrit sur du papier marqué, & vendu par le fisc.