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PRÉLIMINAIRE.

moins les impôts étoient modiques. Le bon ordre & l’économie du gouvernement, les richesses de Carthage, de la Sicile & des villes d’Asie, qui furent portées dans les trésors, suppléerent aux contributions du peuple. Les généraux d’armée n’étoient alors que les dépositaires du butin conquis sur les ennemis.

Quintus, Flaminius, Cornelius Lentulus, Lucius Tertinius, Quintus Minucius, Titus Quintus Flaminius, Acilius, Scipion l’Africain, Lucius Scipion, Cneius Manlius, Caton d’Utique, & plusieurs autres, firent entrer dans le trésor public des sommes immenses après leur conquête de la Macédoine, de l’Espagne, de la Grèce, de l’Afrique, de l’Egypte, du royaume de Pont & de l’Arménie.

Celles que Paul Emile apporta après la défaire du roi Persée, furent si prodigieuses, qu’au rapport de Plutarque, on ne leva aucune sorte d’impôts depuis ce tems jusqu’au condulat de Hirtius & de Pansa[1].

Marius, Sylla, Pompée, César, Lucullus, furent les premiers qui commencèrent à s’attribuer une partie des dépouilles des peuples vaincus auxquels on imposoit pour principale condition, celle de payer les frais de la guerre.


Ils étoient encore obligés de fournir aux armées romaines des tributs & toutes sortes de denrées, même des vaisseaux de guerre & des bâtimens de transport : ainsi, lorsque les armées étoient hors du territoire de la république, elles lui coûtoient peu. On en voit une preuve dans la réponse laconique que Portius Cato, qui commandoit l’armée d’Espagne, fit aux commissaires des vivres que la république avoit envoyés pour pourvoir à la subsistance des troupes. Ce général les congédia, en leur disant : Bellum se alit ; & à son retour, il fit porter vingt millions dans le temple de Saturne.

Les historiens ne font plus mention de taxes ni d’impôts que sous le consulat de Cornelius Dolabella & M. Fulvius Nobilior, l’an de Rome 595 ; 159 ans avant l’ère chrétienne.

Tite-Live dit que ces consuls établirent beaucoup d’impositions, & nommément des droits de douane[2], c’est-à-dire, sur les marchandises.

Quarante ans après, Caïus Gracchus, devenu tribun du peuple, & auteur de la sédition des Gracches, imposa des droits considérables sur les marchandises qui seroient apportées dans les ports du royaume de Pergame, ou qui en seroient exportées : royaume que son souverain Attale avoit légué à la république par testament.

A mesure que les Romains soumettoient des nations, ils y établissoient des impôts du même genre ; on les voit en Sicile, en Espagne, dans les Gaules, dans la Grande-Bretagne & l’Ecosse.

Les tributs de tant de contrées formoient un revenu qui suffisoit aux dépenses de la république. Cette considération, jointe aux plaintes qu’occasionnoit la perception des droits de douane en Italie, fit proposer leur suppression par le préteur Metellus ; & la loi qui l’ordonna environ un siècle avant notre ère, fut reçue avec des applaudissemens universels.

Il ne restoit plus à Rome & dans toute l’Italie d’autre impôt que le vingtième du prix des esclaves vendus ou affranchis par leurs maîtres, créé deux cents cinquante ans auparavant, sous le consulta de C. N. Manlius & Caïus Martius, pour former un trésor public destiné à des[3] dépenses pressantes ou extraordinaires.

  1. Tite-Live & Plutarque rapportent que ce consul, après avoir vaincu Antiochus & les Etoliens, obtint les honneurs du triomphe ; qu’on y vit quatre mille cinq cents marcs d’argent en masse, près de huit mille marcs d’argent monnoyé, deux cents quarante-huit mille cistophores, une grande quantité de vases d’argent ciselés d’un grand poids, & quarante-six couronnes d’or, &c. &c.
  2. Portoria quoque & vectigalia multa instituerunt, lib. 40, cap. 51.
  3. Tite-Liv. lib. 7, cap. 16, & in lib. 27, cap. 12, où il appelle cet impôt aurum vicesimarium.