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Page:Encyclopédie méthodique - Géographie ancienne - Tome 2.djvu/757

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ROM
d’y détruire toutes les villes. En conséquence, il s’empara de tout ce qu’il y avoit de plus précieux, l’envoya à Rome pour le trésor public, et livra le reste au pillage. Il fit de plus cent cinquante mille prisonniers & démentela soixante-dix villes. Ainsi, par-tout ces tyrans de la terre se jouoient du bonheur & de la vie des hommes.

Cétoit par cette conduite exécrable qu’ils avoient fait passer à Rome la plus grande partie des richesses du monde alors connu. Aussi plusieurs particuliers y avoient-ils des revenus excédans ceux de plusieurs souverains actuels. Comme je prends ces calculs dans un auteur anglois, il rapporte ces richesses à la monnoie de son pays (1). Il seroit aisé d’en faire le calcul ; mais le temps ne me le permet pas ici.

Apicius possédoit en fonds 807,291 liv. st. 13 sch. 4 d.

Crispus, simple bourgeois de Verceille, 1,614,583 liv. st. 6 sch. 8 d.

Démétrius, un des affranchis de Pompée, 4000 talens.

Pallas, un des affranchis de Cicéron, 2,411,875 liv. st.

Sénèque le philosophe, ramassa en quatre ans 4,421,875 liv. st.

C. Cecilius Isiodore, quoiqu’il eut beaucoup perdu dans la guerre civile, laissa par testamem 4116 esclaves, 3600 paires de boeufs, encore d’autre bétail au nombre de 275,000 pièces ; & en argent comptant, 484,375 liv. st.

Pomponius Atticus eut de son père, 16,145 liv. 26 s. 8 d. st.

Le patrimoine de Caton le jeune étoit de 17,571 liv. st.

Servius dit, dans la vie de Virgile, qu’il avoit de bien 80,726 liv. 3 sch. 4 d. st., ce qui est assurément bien honnête pour un prêtre.

Les richesses de Cicéron ne nous sont pas connues. Elles dévoient être considérables en Italie. Il avoue qu’il possédoit en Ane 16,762 liv. 9 sch. 4 d. st.

Mais les richesses de Crassus étoient bien plus considérables. Son père, en mourant, lui avoit laissé 300 talens, ou 58,125 liv. st. Plutarque assure qu’il augmenta cette somme jusqu’à 7100 talens, eu 1,375,625 liv. st., avant son expédition contre les Parthes.

De-là ces grandes dépenses, ces profusions des Romains, dans des circonstances qui intéressoient

(1) C’est-à-dire, en livres sterlings. Or, la livre sterling vaut un peu plus de 25 livres 10 f. de notre monnoie.

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leur gloire ou leur vanité. Je n’en raporterai que quelques traits.

Apicius, ce célèbre gourmand, après avoir dépensé pour sa table 807,291 liv. st., sans compter des sommes immenses en pensions & en gratifications, forcé enfin de compter avec lui-même, trouva qu’il ne lui restoit que 80,729 liv. 3 sc. 4 d. st, ce qui fait encore plus de deux millions de notre monnoie. Il trouva que c’étoit trop peu pour ses dépenses, & honteux d’être réduit à cette espèce de mendicité, il s’empoisonna.

Lucullus, pour chaque souper qu’il donnoit dans sa salle d’Apollon, dépensoit 1614 liv. 11 sch, 8 d. st.

Les largesses faites aux soldats étoient aussi très-considérables.

Paul Emile donna à chacun des siens 7 sols & quatre d. st.

Lucullus donna à chacun 30 liv. six & demi d. st.

Pompée, après sa victoire sur les pirates, donna dans son triomphe au public & aux questeurs 19375 liv. st., & à chaque soldat 48 liv. 8 sch. 9 d. st.

Jules César donna en une seule fois à chaque soldat des légions des vétérans, 16 liv. 2 sch. 12 d., & aux chevaliers 193 liv. 15 sch. Dans une autre occasion, à chaque homme 80 liv. 14 sch. 7 d. st. Dans une autre encore 161 liv. 9 sch. 2 d. st. Au commandant d’une compagnie il donnoit le double, aux tribuns des soldats & aux chevaliers 645 liv. 16 sch. 8 d. st.

À ces largesses militaires, il fit ajouter celles que l’on faisoit aussi au peuple.

Jules César, sans compter dix mesures de bled & dix mesures d’huile, donna à chaque citoyen, 3 liv.. 4 sch. 7 d., & légua a chaque homme du peuple 2 liv. 8 sch. 5 un huitième d. st.

Auguste fit en plusieurs occafions des préfens au peuple. Mais en une seule fois il donne à chacun 2 liv. 1 sch. 2 d. st., sans oublier les petits enfans, quoique ce ne fut pas la coutume de donner à quelqu’un au-dessous de l’âge de onze ans.

Cette somme devoit être bien prodigieuse ; car Eusèbe rapporte qu’après la bataille d’Actium, le dénombrement des citoyens Romains en porta le nombre à 4,100,000. En supposant qu’il n’y en eût que deux millions qui reçurent le bienfait d’ Auguste, le total se montoit à 4,036,458 liv. 6 sch. 8 d. st.

De plus longs exposés me conduiroient trop loin. Je finis par observer que ces grandes richesses, qui supposent une grande abondance de numéraire, n’avoient pas influé en mal sur le sort du petit peuple. Les denrées de première nécessité, par