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Page:Encyclopédie méthodique - Géographie ancienne - Tome 2.djvu/9

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GRÆ
GRÆ

GRÆCI.

Introduction.


L’article des Grecs, ainsi que celui de Græcia, ou de la Grèce, présentant plusieurs points de discussion, & nécessitant de parler dans chacun d’eux, tantôt du pays & tantôt du peuple, on ne doit pas être surpris de les trouver quelquefois mêlés ensemble dans l’un ou l’autre article. Mais afin que l’on puisse, en cas de besoin, recourir à ce qui ne sera proprement que géographique ; j’aurai l’attention de résumer tout ce qui appartiendra aux pays dans l’article Græcia. Les points sur lesquels seront établies ces divisions, ou leurs conséquences, se trouveront dans l’article Græci, qui comprendra presqu’entiéiement ceux de Pelasgi, d’Hellènes, que je ne pouvois séparer sans risquer de trop diviser des opinions ou des faits qui perdroient infiniment s’ils étoient isolés, pour les vérités que l’on en tire, comme, des conséquences naturelles. Au reste, j’aurai soin de rappeler, à chaque article détaché, l’article principal auquel il faut recourir. Et pour plus de facilité, tout ce qui va suivre sera divisé en plusieurs articles.

Étymologie.

L’étymologie du mot Græcì & Græcia a été le partage d’un très-grand nombre d’opinions. Les Grecs, dont l’imagination active n’étoit pas arrêtée par des difficultés grammaticales, & qui ont été les plus hardis, en même temps que les moins bons critiques, en fait d’étymologie, ont fait venir leur nom d’un certain Grécus ou Graïcus, fils de Thessalus. Saumaise ne voyoit dans le nom de Gréciis, qu’une altération de celui de Rehu, fils de Phalég ; altération causée par la différence de la prononciation ([1]). Le P. Pezron voyant que Graïa signifioit en celtique, vieille, ainsi qu’en grec, conjecture que l’on avoit pu donner ce nom aux Grecs, par opposition à des peuples plus modernes. Mais malheureusement pour cette étymologie, les premiers noms des Grecs, les noms avec lesquels ils peuvent être regardés comme un peuple ancien, sont ceux de Pélasges & d’Hellènes. Le sentiment même de M. de Gébelin, qui paroît naître de l’ordre des choses, demande un peu plus de développement pour être adopté.


Selon lui, comme on le verra ci-après, les premiers habitans de la Grèce y vinrent du nord, c’est-à-dire, des bords du Danube ; ils portoient alors le nom de Pélasges. Ils avoient à leur droite une mer longue & étroite (le golfe Adriatique), fort resserrée dans toute son étendue ; ils l’appelíèrent la mer Illy-rique, c’est-à-dire, étroite : ils donnèrent de même le nom d’Illyrìe au pays qui étoit sur les côtes. Mais dès qu’en avançant ils eurent trouvé les monts Acro-Cérauniens, à la hauteur de la Clíaonie & de la Thessalie, où se termine le golfe, ils trouvèrent une mer large & spacieuse : Ce ne fut plus le nom illyrique, mais le mot Rha ou Rhe, vaste, immense, dont on fit Raïcus, pour désigner la mer, ou le peuple qui dominoit sur certe mer. Hésychius a conservé çe nom comme primitif des Grecs. Mais, dit M. de Gébelin, comme les linguales L & R se font sans cesse précéder de lá gutturale, le mot Rhaïcus devint aisément Graïcus. Si cette étymologie n’est pas la véritable, au moins est-elle très-heureuse ; & donne de plus la raison pourquoi les peuples portant le nom de Grecs furent distingués de ceux appelés Macédoniens, Thraces, & des autres nations pélasgiques, quoiqu’ayant très-vraisemblablement une origine commune.

Origine.

Les anciens historiens de la Grèce ne parurent que fort tard, & fournissent peu de renseignemens sur l’origine des Grecs. Ils s’imaginèrent que la terre venoit de produire les premiers habitans qui étoient encore au berceau, lorsque des étrangers y vinrent former des établissemens, & ils dédaignèrent tout ce qui avoit précédé. M. de Gébelin pense que la Grèce.n’a pu être peuplée dans les commencemens, que par des colonies de Celtes, qui, cherchant des contrées plus heureuses, & descendant du nord au midi, rencontrèrent la Grèce sur leur route.

Tous les divers peuples des différentes contrées de la Grèce furent connus, dès l’origine, sous le nom de Pélasges.

L’origine de ce peuple a excité l’attention des savans. M. l’abbé Geinoz dit seulement que les Pélasges font antérieurs aux Hellènes, nom d’une partie des Grecs, & que la contrée qu’on désigna par le nom d’Hellas, avoit auparavant été appelée Pélasgie.

M. de la Nauze dit que les Pélasges & les Hellènes étoient deux nations différentes ; que les premiers perdirent leur nom en s’incorporant avec les Hellènes : ce qui étoit consommé dans toute la Grèce dès avant la guerre, de Troye. M. de la Nauze attribue au pays, & non à la nation, le

  1. (1) On seroit porté à croire cette opinion fondée, en voyant combien la différence dans la prononciation, apporte de changement à un même nom. Du mot Ε’σπερ, les Latins ont fait episcopus ; nous vespres ; d’Ε’πισκοποζ, les Latins ont fait episcopus ; les Italiens, vascovo ; les Espagnols, obíspo ; les Anglois, bishop ; & nous, évêques, &c.

Géographie ancienne. Tome II. A