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pensée. Cetordte est le seul qui puisse leur donner toute la clarté 8c toute la précision dont elles sont susceptibles ; 8c comme nous in’avons pas d’autre moyen pour nous instruire nous-mêmes, nous n’en avons pas d’autre pour communiquer nos connoissances. Je Tai déjà prouvé, mais j’y

reviens,.

8c j’y

reviendrai encore ; car cette vérité n’est pas assez connue ; elle est même combattue , quoique simple, évidente 8c fondamentale.

En effet, que je veuille connoître une machine, je la décomposerai, pour en.étudier séparément chaque partie. Quand j’aurai de chacune une idée exacte, 8c que je pourrai les remettre dans le même ordre où elles étoient, alors je

concevrai parfaitement cette machine, parce que je Taurai. décomposée 8c recomposée. Qu’est-ce donc que concevoir cette machine ? C’est avoir une pensée qui est composée d’autant d’idées qu’il y a de parties dans cette machine même, d’idées qui les représentent chacune exactement, 8c qui sont disposées dans 1« même ordre.

Lorsque je Tai étudiée avec cette méthode, qui est la seule, alors ma pensée ne m’offreque f des idées distinctes ; 8c elle s’analyse d’elle-même, soit que je veuille m’en rendre compte, soit que je veuille en rendre compte aux autres. Chacun peut se convaincre de cette vérité par fa propre expérience ; il n’y a pas même jusqu’au plus petites couturières qui n’en soient convaincues ;

car si, leur donnant pour modèle une robe d’une forme singulière, vous leur proposez d’en faire une semblable, eljes imgineront naturellement de défaire 8c de refaire ce modèle, pour apprendre à faire la robe que vous demandez. Elles savent donc l’analyse aussi bien que les philosophes, 8c elles en connoissent Tuti-Uté beaucoup mieux que ceux qui s’obstinent à soutenir qu’il y a une autre .méthode pour s’instruire.

Croyons avec elles qu’aucune autre méthode ne peut suppléer à l’analyse. Aucune autre ne peut répandre la même lumière : nous en aurons la preuve toutes les fois que nous voudrons étudier un objet un peu composé. Cette méthode, nous ne lavons pas imaginée , nous ne Tavons que trouvée, 8c nous ne devons pas craindre qu’elle nous égare. Nous aurions pu, avec les philosophes,

en inventer d’autres, 8c mettre un ordre quelconque entre nos idées ; mais cet ordre , qui n’auròit pas été celui de l’analyse ; auroit mis dans nos pensées la même confusion qu’il a mise dans leurs écrits ; car il semble que plus ils affichent Tordre, plus ils s’embarrassent,

  1. c moins on les entend, Ils ne savent pas que

l :analyse peut seule nous instruire ; vérité pratique connue des artisans les plus grossiers. II y a des esprits justes qui paraissent n’avoir pkri étudié, parce qu’ils ne paraissent pas avoir médité pòur s’instruire : cependant ils ont fait* des études, 8c ils les ont bien faites. Comme ils les faisoient sans dessein prémédité, ils ne songeoient pas à prendre des leçons d’aucun maî< tre-,

8c ils ont eu le meilleur de tous, la nature. C’est elle qui leur a fait faire l’analyse des choses qu’ils étudioient ; 8c le peu qu’ils savent, ils^ le

savent bien. L’instinct , qui est un guide fi sûr ; le goût qui juge si bien, 8c qui cependant juge au moment même qu’il sent ; les talens, qui ne sont eux-mêmes que le goût, lorsqu’il produit ce dont il est le juge ; toutes ces facultés sont TOUT vrage de la nature , qui, en nens-faifant ana*,

lyser à notre insu, semble vouloir nous cacher tout ce que nous lui devons. C’est elle qui inspire Thomme de génie ; elle est la muse qu’il invoque,

lorsqu’il ne sait pas d’oii lui viennent ses pensées.

II y a des esprits faux qui ont fait de grandes études. Ils se piquent de beaucoup de méthode,’ 8c ils n’en raisonnent que plus mal : c’est que, lorsqu’une méthode n’est pas bonne, plus on la fuit, plus on s’égare. On prend pour principes des notions vagues, des mots vuides de sens, on se fait un jargon scientifique -, dans lequel on croit voir Tévidence ; 8c cependant on ne fait dans le vrai ni ce qu’on voit, ni ce qu’on pense, ni cé qu’on dit. On ne sera capable d’analyser ses pensées qu’autant qu’elles seront elles-mêmes l’ouvrage de l’analyse.

C’est donc, encore une fois, par l’analyse, 8c par l’analyse seule, que nous devons nous instruire. C’est la voie la plus simple, parce qu’elle est la plus naturelle , 8c nous verrons qu’elle est encore la plus courte. C’est elle qui a fait toutes les découvertes ; c’est par elle que nous retrouverons tout ce qui a été trouvé ; tk ce qu’on nomme méthode d’invention, n’est autre chose que l’analyse.

Comment la nature nous fait observer les óbjet-ssensibles , pour nous donner des idées de différentes, espèces.

Nous ne pouvons aller que du connu à Tin» connu, est un principe bien trivial dans lathéoi rie , 8c. presqu’ignoré dans la pratique. Il semble qu’il ne soit senti que par les hommes qui n’ont point étudié. Quand ils veulent vous faire comprendre une chose que vous ne connoiffeg pas, ils prennent une comparaison dans une au-* tre que vous connoissez ; 8c s’ils ne font pas toujours heureux dans le choix des comparaisons, ils font voir au moins qu’ils sentent ce qu’il faut faire pour être entendu.

II n’en est pas de même des savans. Quoiqu’ils veuillent instruite,

ils oublient volontiers

d’aller du connu àl’inconnu.

Cependant si vous

voulez me faire concevoir des idées que je n’ai pas, il fa.ut me preridre aux idées que j’ai, Ç’eft