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PRÉLIMINAIRE

sentant au soleil, un miroir concave, par réflexion, le Foyer eut été placé en haut ; ce qui auroit exigé pour l’assignation une position fort incommode, & dont il n’est pas à présumer que Strepsiade ait voulu parler ; mais, si l’on suppose qu’on ait fait usage d’un miroir convexe, par refraction, le Foyer aura été en bas, & l’effet annoncé par Strepsiade s’explique d’une manière simple & naturelle.

On est surpris, après une preuve si formelle de l’antiquité des verres ardens, que Descartes & plusieurs modernes aient révoqué en doute l’opinion généralement reçue, qu’Archimède s’en étoit servi pour embrâser la flotte des Romains, au siège de Syracuse. Leur incrédulité est venue de la préoccupation où ils étoient qu’Archimède auroit employé des miroirs concaves, par réflexion : moyen dont l’insuffisance est démontrée. En effet, pour qu’un miroir de cette espèce formât un Foyer à la portée du trait, c’est-à-dire, à la distance de 150 pieds, il faudroit que le rayon de sphéricité fût de 300 pieds. Or comment exécuter, avec une certaine précision, des verres d’une si petite courbure ? D’ailleurs dans les miroirs d’un si long foyer, les rayons du soleil ne peuvent pas être regardés comme parallèles ; & leur divergence détruit presque totalement l’effet de la convergence produite par le miroir. La combinaison de plusieurs miroirs concaves ne lève pas ces inconvéniens, & ne fait qu’en présenter de nouveaux. Mais le problême change entièrement de nature, si l’on suppose qu’Archimède ait employé des miroirs dénués de toute courbure, ou formant des plans parfaits ; car alors on conçoit sans peine que plusieurs verres plans peuvent être disposés entr’eux de telle manière qu’ils portent les rayons du soleil sur un même point, & qu’ils y forment un Foyer capable d’embrâser le bois, ou même de fondre les métaux. Le fait des miroirs d’Archimède est donc possible : mais a-t-il existé ? Si on consulte les monumens historiques, on trouvera que plusieurs anciens Auteurs, comme Diodore de Sicile, Heron, Pappus, &c, ont écrit qu’en effet Archimède mit le feu à la flotte des Romains avec des verres ardens. Il est vrai que les ouvrages où ils en parloient sont aujourd’hui perdus ; mais ils existoient encore au douzième siècle, puisque Zonaras & Tzetzès, Écrivains de ce tems-là, en citent des passages relatifs à la question présente. Anthemius, Mathématicien & Architecte de réputation, qui vivoit sous Justinien I, & dont M. Dupuy, de l’Académie Royale des Belles-Lettres, nous a traduit les précieux restes, ne se contente pas d’attester le même fait : il explique la théorie & le méchanisme de ces miroirs.

Envain objecteroit-on ici que Polybe & Titelive ne font aucune