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ARC

terre où l’air eſt chargé d’une plus grande abondance de vapeurs, dont les molécules ſont d’une grande ténuité, & que leur ſommet, qui ſe trouve dans un air condenſé, échappe preſque à la vue. On prétend que ces arcs-en-ciel blancs ſont obſervés plus ſouvent dans les régions ſeptentrionales où l’air eſt plus épais. Menzelius vit auſſi le 3 février 1681, trois iris ſe ſuccéder dans l’eſpace de deux heures. Le premier parut à quatre heures du ſoir, le ſoleil étant près de son coucher, & l’horiſon étant ſerein : c’eſt dans la partie oppoſée du ciel, chargée de nuages interrompus, qu’on obſerva un arc-en-ciel blanchâtre. Sa couleur devint dorée, de même que celle des nuages, à meſure que le ſoleil s’approcha de l’horiſon. Enfin, lorſque le ſoleil fut couché, la lune, qui étoit à son plein, s’étant levée, on obſerva du côté du couchant un arc-en-ciel blanc qui dura quatre heures. Il y avoit eu en même temps autour de la lune un halo très-ſi ble.

Mariotte parlant des arcs-en-ciel ſans couleurs dans ſon eſſai de phyſique, dit qu’ils ſe forment ſur les brouillards, comme les autres dans la pluie, & il aſſure en avoir vu pluſieurs fois, ſoit le matin après le lever du ſoleil, ſoit la nuit à la clarté de la lune. « J’en ai vu, dit Mariotte, à trois diverſes fois ; la dernière fois j’en vis deux de ſuite en moins d’une demi-heure. C’étoit au mois de ſeptembre ; il avoit fait un grand brouillard au lever du ſoleil. Une heure après, le brouillard ſe ſépara par intervalles ; un vent qui venoit du levant ayant pouſſé un de ces brouillards ſéparés à deux ou trois cents pas au-delà du lieu où j’étois, & le ſoleil luiſant clairement deſſus, je vis un arc-en-ciel ſemblable en grandeur, en ſituation, & en figure, à un arc-en-ciel ordinaire. Il étoit tout blanc hors un peu d’obſcurité qui le terminoient à l’extérieur ; la blancheur du milieu étoit très-éclatante, & ſurpaſſoit de beaucoup celle qui paroiſſoit ſur le reſte du brouillard ; il n’avoit qu’environ un degré & demi de largeur. Un autre brouillard ayant été pouſſé de même, je vis un autre arc-en-ciel ſemblable au premier ; ces brouillards étoient si épais, que je ne voyois rien au-delà. » Cet illuſtre phyſicien penſe en conſéquence que ces arcs-en-ciel ſans couleurs ſe font dans les brouillards, comme les autres ſe font dans la pluie, & que le défaut de couleurs vient de la petiteſſe des vapeurs imperceptibles qui compoſent les brouillards.

Iris perpendiculaires ou Verges. Nous plaçons ici ce qui regarde les iris perpendiculaires, parce que l’ordre méthodique, bien ſupérieur à l’ordre alphabétique, l’exige. Les iris perpendiculaires, qu’on ne peut nommer des arcs-en-ciel perpendiculaires, parce que, plus ſouvent droites que courbés, ils ne ſont alors que des portions d’arcs-en-ciel blancs ; & quand ils ont des couleurs, ils ne ſont que des parties d’arcs-en-ciel ſolaires dont la courbe ſupérieure manque. Cette explication nous paroît bien plus ſimple que celle d’un auteur qui ſoutient qu’ils ne ſont autre choſe que des faiſceaux ou colonnes de vapeurs très-atténuées, qui s’élèvent en petit volume & dans une direction perpendiculaire, ſur leſquelles les rayons lumineux viennent ſe briſer & ſe réfléchir, mais dont les couleurs ne ſont point diſtinguées comme celles de l’arc-en-ciel.

L’auteur de l’Hiſtoire naturelle de l’air & des météores, (tom. VII, p. 322) aſſure avoir vu deux météores de ce genre. Le premier parut le 27 août 1768, le ciel étant fort embrumé du nord au ſud, & le vent, de l’oueſt au nord. « Je vis, dit-il, environ trois-quarts d’heure avant le coucher du ſoleil, une verge ou iris perpendiculaire, diviſée par les nuages qui en laiſſoient voir tantôt une partie, tantôt une autre, dont les couleurs étoient rangées dans l’ordre suivant : le rouge en-dedans, le jaune & le vert en-dehors, ces deux couleurs peu démêlées. Cette apparence ſe ſoutint plus d’une heure, on ne l’apercevoit que par intervalles ; il y avoit des nuages au deſſous qui la cachoient de temps en temps. J’ai obſervé le ſecond le 18 décembre 1769 ; le vent étoit ſud-oueſt, l’air nébuleux & épais ; & pendant que le ſoleil ſe plongeoit dans un brouillard pâle & preſque tranſparent, il ſort du point de l’horiſon où le ſoleil devoit ſe coucher, une grande verge ou pyramide renverſée d’un rouge aſſez vif, & qui paroiſſoit au travers du brouillard répandu à l’horiſon. Après le coucher du ſoleil, elle ſe teignit d’un rouge pourpre, & on continua de la diſtinguer pendant plus de trois-quarts d’heure ; elle étoit d’un rouge plus obſcur dans les endroits où les bandes des nuages la coupoient horiſontalement : on put en remarquer la forme tant que le crépuſcule eut quelque éclat. La lune étoit alors à son vingtième jour, & ne ſe leva que long-temps après que ce météore eut diſparu dans les ténèbres de la nuit. »

Le 3 octobre 1789, ſur les cinq heures & un quart du soir, j’aperçus, à Béziers, du côté du vrai orient, un iris perpendiculaire ; la largeur de cette bande étoit deux fois plus grande que celle des arcs-en-ciel ordinaires, & la hauteur de douze ou quinze fois la largeur. On diſtinguoit très-bien pluſieurs des couleurs priſmatiques : le rouge paroiſſoit à la droite du côté du ſud ; l’orangé, le jaune, le vert & le bleu étoient placés à la ſuite, en allant vers le nord ; le rouge, le jaune & le vert étoient beaucoup plus vifs que l’orangé & le bleu. Cette bande colorée étoit un iris parfaitement perpendiculaire ; on ne voyoit aucune apparence de courbure. Dans le reſte du ciel, il n’y avoit pas de veſtige d’aucune autre portion de bande colorée.

Quoique le ciel fût aſſez clair dans la partie ſupérieure, cependant il y avoit des nuages plus ou