Page:Encyclopédie méthodique - Physique, T1.djvu/179

La bibliothèque libre.
Le texte de cette page a été corrigé et est conforme au fac-similé.
AMI-AMO
165

qu’on la travailloit difficilement, & qu’elle étoit auſſi chère que les plus belles perles. On lui donnoit le nom de lin incombuſtible.

L’art de filer l’amiante eſt preſque perdu. On a fait des efforts pour le retrouver. Les habitans de quelques vallées des Pyrenées, où on trouve beaucoup d’amiante, en font des bourſes & des jaretières qu’ils vendent aux curieux ; j’en ai dans mon cabinet d’hiſtoire naturelle, qui ſont véritablement incombuſtibles, mais qui ſont bien groſſièrement travaillées.

Ciampini dit dans ſon traité de la manière de filer l’amiante, qu’il faut d’abord la faire tremper dans l’eau chaude pour en ſéparer, par le broiement, les parties terreuſes & les filamens les plus courts. Enſuite on carde un peu l’amiante ; on l’unit avec du coton ou de la laine filée, pour en faire une toile compoſée. Après cette dernière opération, on jette la toile au feu, qui conſumant le coton & la laine, ne laiſſe plus qu’un tiſſu d’amiante. Il y en a qui recommandent de faire tremper l’amiante dans l’huile bouillante, pour l’amollir & en rendre les filamens plus flexibles : mais cette précaution paroît inutile pour l’amiante blanche & ſoyeuſe. Dans mes collections d’hiſtoire naturelle, j’en poſſède de ſemblables, qui eſt d’une très-grande flexibilité.

On a fait du papier incombuſtible avec l’amiante ; on y emploie ſes brins les plus petits & les plus fins qui ne peuvent être filés. On ſent combien il ſeroit avantageux de pouvoir rendre cette fabrique aſſez générale pour conſerver des titres précieux malgré les incendies ; mais il faudroit auſſi trouver une encre indeſtructible. Le Père Kirker parle dans son mundus ſubterraneus, Liv. 8, d’un papier d’amiante qu’il jettoit au feu pour en effacer l’écriture, & ſur lequel il écrivoit enſuite de nouveau.

Personne n’ignore que les lampes perpétuelles ſont une fable. On citoit en leur faveur le témoignage de quelques perſonnes qui avoient vu, en ouvrant des tombeaux, des lampes allumées. Si cette obſervation eſt réelle, on doit attribuer l’effet à quelque gaz ou matière phoſphoreſcente qui ſe ſera enflammée à l’air. Voyez Lampes perpétuelles, Phosphore, Gaz, &c.

Si on étoit en peine d’aſſigner une huile perpétuelle, on ne l’étoit pas pour la mèche ; car on a prétendu que l’amiante étoit une mèche perpétuelle & abſolument indeſtructible ; mais ce fait eſt faux. Il eſt bien vrai que ſi on met dans la flamme d’une bougie ou ſur un charbon ardent un filament d’amiante, on le verra rougir entièrement revenir dans ſon premier état, un inſtant après qu’on en aura retiré. Cependant ſi on réitère pluſieurs fois cette opération, ou ſi l’on ſe ſert pendant quelque temps d’un petit faiſceau d’amiante dans une lampe à huile, on obſervera que les filamens auront diminué, parce que de temps en temps des brins éclatent & s’échappent du corps des filamens d’amiante. À cet égard, les mêches d’argent qu’on emploie dans les lampes à esprit-de-vin ſont beaucoup préférables & mériteroient bien plutôt le nom de mèches perpétuelles.

L’asbeſte eſt un genre de pierre voiſin de l’amiante. Ses filets ont plus de cohérence, plus de dureté & de rigidité que ceux de l’amiante, ils ne ſont même point flexibles, & ne peuvent être aucunement travaillés. Par cet expoſé, on voit quelle eſt l’erreur dans laquelle eſt tombé l’auteur d’un dictionnaire de phyſique, article Amiante : le voici en ſon entier. « C’eſt une pierre filamenteuſe, c’eſt-à-dire, une pierre compoſée de fils ſerrés les uns contre les autres. On détache adroitement ces fils pour les mettre au rouet, & on en fait l’asbeſte, qui n’eſt autre choſe qu’une toile qui non-ſeulement réſiſte au feu, mais qui encore ſe purifie & ſe blanchit dans cet élément. » L’asbeſte n’eſt pas la toile faite avec l’amiante ; c’eſt un genre de pierre auſſi diſtinct que l’eſt l’amiante. Selon quelques auteurs, l’amiante & l’asbeste ſont des ſortes de pierres contenues dans le même genre.

AMO

AMONTONS. M. Amontons a été un des plus ingénieux phyſiciens du ſiècle dernier. Devenu ſourd à la ſuite d’une maladie dans ſa première jeuneſſe, il ſe ſéqueſtra du commerce des hommes & ſe tourna du côté des machines. Le desir de trouver le mouvement perpétuel lui fit apprendre la géométrie. Il s’appliqua enſuite au deſſin, à l’arpentage, à l’architecture, & fut employé dans pluſieurs ouvrages publics ; mais bientôt après il s’éleva plus haut & ſe tourna vers la phyſique, principalement vers cette partie qui traite des baromètres, des thermomètres & des hygromètres. M. Amontons les étudia avec beaucoup de soin, & en 1687, n’ayant encore que 24 ans, il préſenta à l’académie des ſciences un nouvel hygromètre, qui en fut approuvé.

Peut-être ne prendra-t-on, dit M. de Fontenelle, que pour un jeu d’eſprit, un moyen ingénieux qu’il inventa, de faire ſavoir tout ce qu’on voudroit à une très-grande diſtance, par exemple, de Paris à Rome, en très-peu de temps, comme en trois ou quatre heures, ſans que la nouvelle fût lue dans tout l’eſpace intermédiaire. Le ſecret conſiſtoit à diſposer dans pluſieurs poſtes confécutifs, des gens qui par des lunettes à longue vue, ayant aperçu certains ſignaux du poſte précédent, les tranſmiſſent au suivant, & toujours ainſi de ſuite.

En 1695 notre phyſicien donna le ſeul livre imprimé qui ait paru de lui. Remarques & ex-