Page:Encyclopédie méthodique - Physique, T1.djvu/505

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On a propoſé de former un ballon aéroſtatique vide, comme un récipient placé ſur une machine pneumatique dont on auroit pompé l’air. Ce ballon ſphérique ſeroit conſtruit de plaques de tôle, recouvertes d’une peinture à l’huile afin d’éviter la rouille en dehors & en dedans ; on pourroit ſubſtituer à la tôle du fer blanc ou du cuivre laminé. Pour éviter les effets de la compreſſion de l’air, après qu’on auroit fait le vide, on auroit ſoin, en conſtruiſant cet aéroſtat, d’introduire dans le ballon, comme centre de la ſphère, une boule creuſe & forte, & de faire partir de cette boule une infinité de rayons, compoſés de tuyaux de tôle ou de fer blanc, non fermés dans leur longueur ; un bout ſeroit appuyé sur la petite boule, & l’autre boule s’adapteroit à la circonférence intérieure du globe. Ces rayons ſeroient dirigés proportionellement à la ſurface ; ſi le globe étoit fort gros, on placeroit un rayon de quinze en quinze degrés de la circonférence, ſur tous les ſens ; s’il avoit un plus petit diamètre, la diſtance entre les rayons ſeroit d’un plus grand nombre de degrés. Ces tuyaux ſont préférables à des barres de fer, parce qu’ils ont l’avantage de moins peſer & d’apporter la même réſiſtance, s’ils ſont bien droits & faits avec ſoin.

Le moyen ſuivant peut ſervir à diminuer la multiplicité de ces rayons, & conſéquemment la peſanteur qui en réſulte. On formeroit la carcaſſe de l’aérostat comme la ſphère armillaire, où les méridiens ſont traverſés par l’équateur, les tropiques & les cercles polaires ; & cet aéroſtat ſeroit compoſé de barreaux de fer méplats, qui ſeroient contournés ſur leurs côtés le plus étroit ; de plus on les ſoutiendroit en faiſant traverſer cette carcaſſe par quelques diamètres en pluſieurs ſens ; ſur cette carcaſſe on établiroit les bandes de tôle, de fer-blanc ou de cuivre laminé, & le ballon ſeroit achevé ; les bandes ſe réuniſſant à l’un & l’autre pôles, comme les méridiens de la ſphère, on ménageroit une ouverture à chacun de ces pôles ; celle du pôle qui regarderoit le zénith, ne ſeroit fermée que par un clapet, qu’on pourroit lever ou baiſſer à volonté, mais fait avec tant de ſoins, qu’il ne pût nuire au vide quand on le feroit dans le ballon. À l’ouverture inférieure ſeroit adapté un corps de pompe ſemblable à celui des anciennes machines pneumatiques, avec un piſton à étrier. Si l’aéronaute élevé dans l’atmoſphère, veut s’élever plus haut que la couche d’air où il eſt ſuppoſé être, il fera jouer de nouveau la pompe pneumatique ; s’il veut redeſcendre, il laiſſera rentrer une partie de l’air.

Ce projet de ballon eſt de l’auteur de l’eſſai ſur l’art du vol aérien ; il n’eſt pas impoſſible phyſiquement d’exécuter un aéroſtat en métal, mais l’exécution en eſt d’une difficulté ſi grande, que dans la pratique on doit le regarder comme impoſſible. Quel temps d’ailleurs ne faudrait-il pas pour le vider d’air ! On en ſera convaincu en comparant la capacité de ce vaſte & énorme ballon, avec celle des plus grands corps de pompe pneumatique connus. On peut dans la réalité ne regarder cette idée que comme un jeu de l’imagination.

D’autres perſonnes ont eu auſſi le projet de faire des aéroſtats en métal & de les remplir de gaz ; & il ſeroit trop long de faire mention des diverſes idées qui ont été publiées à ce ſujet. On ne peut nier qu’un aéroſtat métallique n’ait des avantages particuliers, celui d’être plus durable, de conſerver conſtamment ſa force aſcensionnelle, ne faiſant aucune déperdition, &c. Mais les grandes dépenſes néceſſaires pour ſa conſtruction, les grandes & nombreuſes difficultés de l’exécution le laiſſeront toujours dans la claſſe des projets romaneſques.

Si on vouloit conſtruire des aéroſtats en métal & à air raréfié, les difficultés de conſtruction ſeroient d’abord les mêmes, & de plus elles augmenteroient à cauſe des dimenſions plus grandes qu’on ſeroit obligé de leur donner. Suppoſons que des feuilles de laiton laminées à un huitième de ligne, préſentent aſſez de ſolidité, un pied carré de ces feuilles pèſe communément de 66 à 67 gros ; ce qui donne pour un globe de 50 pieds de diamètre ſeulement, un poids total de près de 4 000 livres, ſans compter les recouvremens, les ſoudures, & les renforcemens indiſpensables. Or, un globe de ce diamètre déplaçant environ 5 600 liv. d’air commun, il s’en faudroit 1 200 livres qu’il ne pût ſe ſoutenir ſeul en l’air, étant ſuppoſé plein d’air dilaté, même en admettant que l’on pût y entretenir une dilatation capable de diminuer de moitié l’air atmoſphérique. Un pareil globe rempli de gaz inflammable, qui fût ſeulement dans le rapport de peſanteur avec l’air commun, comme 1 eſt à 6, jouiroit déjà d’une légèreté reſpective de 667 livres. Si on employoit du gaz tiré du zinc, qui peut être eſtimé moyennement dans le rapport de peſanteur avec l’air commun, comme 1 eſt à 12, ce globe, de cinquante pieds, auroit une force d’aſcenſion de 1 133 livres.

Dom Gauthey a eu une idée ingénieuſe ſur la conſtruction des doubles ballons. Comme il pourroit peut-être arriver qu’on trouvât un jour quelque matière ſolide & ſans ſoupleſſe qui ſeroit préférable au cuir même pour la conſtruction des machines aéroſtatiques, & qu’il ſeroit impoſſible de les tordre ou de les comprimer pour en faire ſortir l’air commun qu’elles contiendroient, avant de les remplir du gaz dont on voudroit les animer, ce phyſicien a proposé d’introduire dans le ballon inflexible un autre ballon d’un volume égal & d’une étoffe très-mince & très-ſouple, telle que ſeroit du taffetas gommé, & qui ſeroit bien-tordu, & conſéquemment bien privé d’air. Il veut enſuite qu’après avoir fait un petit trou au ballon extérieur,