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Si le fluide électrique, ſurabondant dans la terre, n’avoit pas trouvé des iſſues faciles, ou si ſa quantité avoit été par-tout trés-conſidérable, eu égard aux circonſtances locales, il eſt certain qu’il y auroit eu, dans un grand nombre de lieux en Europe, des ſecouſſes & des bouleverſemens, parce que le propre du fluide électrique eſt de rétablir ſon équilibre rompu, ou inſenſiblement, ou par de violentes éruptions, ſelon les circonſtances. L’exiſtence de ce trouble d’équilibre, pendant une partie de cette année, eſt prouvée par les oſcillations fréquentes, bruſques & rapides qu’on a obſervées dans le mercure du baromètre.

Le ſentiment que je viens d’expoſer, en dernier lieu, me paroît plus ſimple & plus naturel que celui qui attribue le brouillard de 1783 aux exhalaiſons élevées par le tremblement de terre de la Calabre & de la Sicile, que les vents ont tranſportées en divers lieux ; car on concevra difficilement que cette cauſe ait pu les répandre uniformément dans toute l’Europe, les vents n’ayant eu ni aſſez de force, ni la même direction dans tout cet eſpace du globe pour les diſtribuer ainſi. De plus, comme on l’a remarqué, ce brouillard a paru le même jour, le 18 juin, dans toute l’Europe, les diſtances de tant de lieux auſſi éloignés les uns des autres étant ſi conſidérables, il n’eſt pas poſſible que les vents aient apporté ces exhalaiſons en même temps dans les lieux auſſi éloignés de la Sicile & de la Calabre, que la plupart de ceux où on a aperçu le ſoleil au travers de ce brouillard ; car tout tranſport local eſt ſucceſſif, & exige plus de temps pour des endroits éloignés, que pour ceux qui ſont proches. D’un autre côté, les obſervations qu’on a faites ſur la nature de ce brouillard ſec, & qui a également paru en même temps dans les contrées méridionales, où la ſéchereſſe régnoit depuis long-temps. Ces obſervations montrent qu’on ne peut guère regarder les pluies comme l’origine de ce ſingulier brouillard, qui étoit plutôt compoſé d’exhalaiſons que de vapeurs, ainſi que ſon odeur ſulfureuſe, & ſes autres propriétés l’annonçoient.

BRU

BRUINE. C’eſt une eſpèce de petite pluie fine qui tombe lentement, & dont les gouttelettes ſont très-multipliées. Pluſieurs cauſes peuvent la produire, la condenſation de l’air, ſa raréfaction, & les vents, en un mot, les cauſes qui donnent naiſſance aux brouillards. (Voyez Brouillard). L’air ſe condenſant, pluſieurs molécules d’eau ſe réuniſſent à d’autres, & devenant plus peſantes qu’un égal volume d’eau, tombent en petite pluie, ou bruine. L’air ſe raréfiant devient incapable de ſoutenir les vapeurs qui lui étoient unies ; il les abandonne alors & elles tombent en brouillards ou en bruine, selon que les vapeurs ont ou n’ont pas aſſez de maſſe pour former une petite pluie. Sous le récipient de la machine pneumatique dont on évacue l’air, ne voit-on pas une eſpèce de brouillard ſe former & retomber, lorſque l’air abandonne les vapeurs ? On y apercevroit ſouvent des gouttelettes tomber, ſi la maſſe d’air contenue dans le récipient étoit aſſez conſidérable pour fournir une ſuffisante quantité de molécules aqueuſes. Les vents, pouſſant avec une certaine force une maſſe conſidérable d’air, ſoit de divers côtés, ſoit contre un obſtacle, une montagne par exemple, peuvent produire une bruine ou un brouillard, ces deux météores aqueux ne différant entre eux que du plus au moins. En effet, ſuppoſons que les cauſes qui produiſent le brouillard augmentent d’intenſité, on aura de la bruine, c’eſt-à-dire, une pluie très-fine ; ſi les cauſes qui forment la bruine diminuent, on n’aura qu’un brouillard. Cette manière de conſidérer la formation des bruines me paroît ſimple, & liée avec les autres météores aqueux : auſſi ai-je éprouvé qu’elle faiſoit beaucoup plus d’impreſſion ſur l’eſprit de ceux qui s’appliquent à l’étude de la Phyſique.

La bruine peut être aſcendante ou deſcendante ; on vient de parler de celle-ci. Elle ſera aſcendante, lorſque les vapeurs qui s’élèveront d’une terre plus échauffée ou plus électriſée que l’air, ſe réuniront avec les molécules aqueuſes répandues dans l’atmoſphère, & les détermineront, par cette acceſſion de maſſe, à tomber.

[ La bruine a encore lieu, lorſqu’une nuée ſe diſſout & change par-tout également, mais lentement ; en ſorte que les particules aqueuſes dont la nuée eſt compoſée, ne ſe réunifient pas en trop grand nombre ; ces particules forment de petites gouttes, dont la peſanteur ſpécifique n’eſt preſque pas différente de celle de l’air : & alors ces petites gouttes tombent fort lentement, & forment une bruine qui dure quelquefois tout un jour, lorſqu’il ne fait point de vent. Elle a auſſi lieu, lorſque la diſſolution de la nuée commence en-bas, & continue de ſe faire lentement vers le haut ; car alors les particules de vapeur ſe réuniſſent & ſe convertiſſent en petites gouttes, à commencer par les inférieures, qui tombent auſſi les premières, enſuite celles qui ſe trouvent un peu plus élevées, ſuivant les précédentes ; & celles-ci ne groſſiſſent pas dans leur chûte, parce qu’elles ne rencontrent plus de vapeurs en leur chemin ; elles tombent ſur la terre avec le même volume qu’elles avoient en quittant la nuée. Mais ſi la partie ſupérieure de la nuée ſe diſſout la première & lentement de haut en-bas, il ne ſe forme d’abord dans la partie ſupérieure que de petites gouttes, qui, venant à tomber ſur les particules, qui sont plus bas, ſe joignent à elles ; & augmentant continuellement en groſſeur, par les parties qu’elles rencontrent ſur leur paſſage, produiſent enfin de groſſes gouttes, qui ſe précipitent ſur la terre. ]

Une diminution de chaleur eſt ordinairement pro-