ENCYCLOPÉDIE
A
A. (Grammaire, etc.) L’A, première voyelle et première lettre des alphabets de toutes les langues de l’Europe moderne, comme il l’était de l’alphabet latin, se retrouve, avec le même rang et une valeur analogue sinon toujours identique, dans l’alpha des Grecs, l’élif des Arabes, l’olaf des Syriens, l’alef des Hébreux et des Phéniciens, mais ne correspond qu’au treizième caractère du syllabaire des Éthiopiens et au dixième de l’alphabet runique ou des anciens Scandinaves.
Tous les auteurs qui ont écrit sur la valeur des lettres, s’accordent à représenter celle-ci comme l’expression du son qui demande le moins d’effort aux organes de la parole. L’abbé de Dangeau, dans son Discours sur les voyelles, la définit : « un son poussé du gosier et retentissant dans le palais sans être déterminé ou contraint par aucune partie de la bouche. » L’émission en paraît tellement facile à l’auteur du Mécanisme de la parole imprimé à Vienne en 1791, le baron de Kempelen, qu’il va jusqu’à soutenir qu’elle pourrait être parfaitement prononcée par quelqu’un qui n’aurait ni langue, ni dents, ni lèvres. C’est, du reste, le premier son qui sorte de la bouche des enfants et le premier aussi qui échappe à tous les hommes dans les mouvements soudains de la douleur, de la joie, de la surprise, de l’admiration. Aussi a-t-on remarqué que, dans toutes les langues, il entre dans les premiers mots du vocabulaire de l’enfance et se trouve à la tête de la liste des interjections. Les auteurs du Dictionnaire de Trévoux rappellent, au sujet de cette lettre, l’étrange opinion de l’Espagnol Covarruvias, qui prétend qu’en naissant les garçons font entendre le son a parce que c’est l’initiale du nom d’Adam, et les filles le son e parce que c’est l’initiale du nom d’Ève.
En même temps qu’il est le plus naturel des sons de la voix humaine, l’A en est aussi l’un des plus éclatants, bien que nous doutions que ce soit, comme le prétend Court de Gébelin, dans son Plan du monde primitif, « celui que l’on entend de la plus grande distance. »
On a calculé que le douzième des mots français commence par A. Cette lettre est celle des finales les plus communes dans les idiomes du midi de l’Europe ainsi que dans la langue russe. En arménien, elle sert d’initiale au septième des mots de la langue et entre dans leur composition pour une proportion égale à celle de toutes les autres voyelles ensemble. En sanskrit, elle fait un office analogue à celui du scheva hébreu. Non-seulement elle s’interpose entre les consonnes séparées que n’accompagne pas une autre voyelle, mais elle est en outre la voyelle unique d’une foule de mots. Remarquons en passant que Cicéron, dans son Traité de l’Orateur, c. 149, recommande d’éviter le retour trop fréquent du son a, qu’il qualifie de lettre désagréable (insuavissima littera).
Il ne faut pas croire que le caractère a représente un son constamment identique. Sans parler en effet des quatre valeurs qui lui sont reconnues dans la prononciation de la langue anglaise, on ne peut nier qu’il n’ait dans notre propre langue deux sons distincts, que l’on trouve l’un et l’autre dans le mot amas. Le premier de ces sons a été fort improprement appelé par la plupart de nos grammairiens a bref, et le second tout aussi improprement a long. Il y a évidemment entre ces deux sons plus qu’une simple différence de quantité. Le prétendu a bref est une voyelle parfaitement distincte de l’autre, et pour l’émission de laquelle la langue doit, en s’élevant sensiblement vers le palais, rétrécir le canal par lequel s’échappe la voix, tandis que pour le prétendu a long, elle demeure étendue à plat dans la
Encycl. mod. — T. I