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désignait. La misère de ces hommes est si grande qu’ils ne peuvent offrir que de l’eau aux étrangers qui abordent chez eux : sous leur climat brûlant c’est un présent inestimable. Des voyageurs rapportent que les femmes Danakil ont la physionomie fort agréable.

L’empereur d’Abyssinîe prend le titre de Neguça Nagast’z Aitiopia, roi des rois d’Ethiopie ; ce qui l’a fait désigner par quelques voyageurs sous le nom de Grand Négus. Certains écrivains l’ont aussi nommé Prêtre-Jean, par suite de l’ancienne confusion de l’Inde avec l’Ethiopie. On savait que le monarque de l’Abyssinie était chrétien, et on ne crut pouvoir lui attribuer une dénomination plus convenable que celle qui impliquait des fonctions sacerdotales. Ce nom, qui prit naissance au milieu des ténèbres du moyen âge, est une corruption de Presta-Kan, prêtre-roi. Il appartenait à un prince mogol, de la secte des nestoriens ; les relations italiennes le travestirent en Prêtre-Gianni. Le premier voyageur qui parla de ce prêtre Jean 3 le plaça dans l’Inde habitée par des nègres. Or, lorsque les Portugais, dans le cours de leurs découvertes, furent arrivés au Congo, ils apprirent des habitants que, très loin derrière eux, vivait dans l’intérieur de l’Afrique un prince chrétien ; il n’en fallut pas davantage pour transformer le Grand-Négus en Prêtre-Jean.

Quoique doués de bonnes qualités, car ils sont affables, prévenants et hospitaliers, et de dispositions heureuses qui se manifestent chez ceux auxquels l’éducation permet de les développer, les Abyssins, entourée de peuples à demi sauvages et dégradés par le gouvernement despotique » languissent dans un état voisin de la barbarie. Leur bravoure n’étant pas dirigée par la tactique ne leur sert qu’à se faire massacrer en plus grand nombre s’ils succombent dans le combat. Vainqueurs, ils se livrent à une extrême férocité, et dans leurs triomphes, peu fréquents, ils portent en trophée les parties sexuelles de leurs ennemis restés sur le champ de bataille. Bruce, voyageur anglais qui raconté cette coutume atroce, est d’accord sur ce point avec Ludolf. C’est aussi lui qui dit que dans leurs festins d’apparat, les Abyssins découpent, pour les manger sur-le-champ, des tranches de chair d’un bœuf vivant, dont le sang ruisselle dans le vestibule, et dont les mugissements se mêlent aux cris de joie des convives (il ajoute que l’hydromel renforcé d’opium anime la brutale gaieté de ces odieux banquets. Un autre Anglais, M. Salt, qui a visité l’Abyssinie depuis Bruce, affirme que sur ce point, comme sur quelques autres, son compatriote a exagéré. les faits. Il convient que les Abyssins mangent de la viande crue qu’ils assaisonnent d’une sauce de sang frais ; il convient que cette chair crue est servie pendant que les fibres sont. encore palpitantes, mais il assure que l’on commence par séparer la tête du corps, de l’animal. Il dit aussi que Bruce s’est trompé en racontant que les grands seigneurs abyssins, par l’effet d’une indolence dédaigneuse, se font mettre par leurs serviteurs les aliments dans la bouche. Du reste, les Abyssins se feraient scrupule de manger avec d’autres qu’avec des chrétiens.

Les maisons des Abyssins sont des cabanes rondes, couvertes d’un toit conique. Ils ont pour vêtement une


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