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ALPHABETS ANCIENS. 7

ques. Ces deux derniers alphabets, le pélasge & l’étrusque, ont un rapport si particulier avec l’alphabet grec de l’inscription de Sigée & d’autres monumens anciens, qu’il est aisé de voir qu’ils n’en faisoient qu’un même dans le commencement, & qu’ils tiroient également leur origine des lettres phéniciennes.

PLANCHE IX.
Gothique.

Vulphilas, goth de nation, successeur de Théophile à l’évêché de Gothie, du tems de l’empereur Valens, fut le premier qui donna les lettres à sa nation. Jean le grand & d’autres prétendent cependant que Vulphilas ne fut point l’auteur de ces lettres, & ils ajoutent que, s’en étant servi pour sa version de l’Ecriture-sainte faite sur le texte grec, il fut regardé comme l’auteur de ces caracteres. Mais il y a lieu de penser que la prétention de ces écrivains n’est fondée que sur une antiquité imaginaire qu’ils veulent donner aux lettres gothiques. A les en croire, les Goths avoient des lettres antérieurement au tems que Carmenta fut avec Evandre, de Grece en Italie. Ils poussent même cette antiquité par-delà le déluge & jusqu’au tems des géans, auxquels ils attribuent l’érection de ces masses énormes de pierres que l’on remarque dans le Nord.

Ces auteurs, pour prouver ce qu’ils avancent si légèrement, devroient avant tout, accorder la même antiquité aux lettres greques, puisqu’il est certain que les lettres des Goths en dérivent, de même que les lettres copthes, serviennes & moscovites. Philostorge qui étoit contemporain d’Ulphilas qu’il appelle Οὐρφίλας, dit que ses parens maternels étoient de Cappadoce.

Alphabet Gothique, carré.

Le gothique carré qui tient beaucoup du caractere allemand, a été en usage fort long-tems, & même en France.

Islandois.

L’Islande est une grande isle qui a environ deux cens lieues de long, sur cent de largeur ; elle est située au nord de l’Ecosse, entre la Norvege, dont elle dépend, & le Groenland. L’alphabet islandois n’est point différent de l’alphabet runique. Cet alphabet, tel qu’on le donne ici, est rangé suivant l’ordre de notre alphabet ; l’ancien alphabet islandois ne contenoit que seize lettres que l’on rangeoit dans l’ordre suivant, qui est l’ordre naturel, par rapport à la valeur numérique.

Nom.  Valeur numérique. Nom. Valeur numérique.
Fie, I. att. Jis IX. niu.
Ur, II. tu. Aar, X. titiu
Duss, III. thry. Sol, XI. allivu.
Oys, IV. fiuhur. Tyr, XII. tolf.
Ridhr, V. fem. Biarkan, XIII. threttan.
Kaun, VI. siax. Lagur, XIV. fiurtan.
Hagl, VII. siau. Madur, XV. femtan.
Naud, VIII. atta. Yr, XVI. siaxtan.

Nous avons fait entendre que les dénominations des lettres hébraïques avoient leurs significations ; les lettres islandoises ou runiques sont dans le même cas, & voici celles qu’on y attache.

Fie signifie troupeau, & métaphoriquement richesses. Cette lettre représente, dit-on, un animal qui badine avec ses cornes.

Ur, un torrent, étincelles qui sortent du fer rouge que l’on bat. La lettre représente le torrent.

Duss, exprime les spectres qui habitent les montagnes & les lieux écartés, & qui se montroient autrefois aux femmes & aux petits enfans sous la forme de nains & de géants. La ligne droite de la lettre représente le spectre ; la ligne courbe, la montagne ou colline.

Oys, port, golfe.

Ridhr, cavalcade ; ce caractere paroit représenter un cavalier qui monte à cheval.

Kaun, ulcere, démangeaison.

Hagl, grêle.

Naud, nécessité.

Jis, goutte d’eau qui se glace en tombant.

Aar, fertilité des campagnes. La lettre représente un soc de charrue.

Sol, la lumiere du soleil. On a voulu représenter les rayons de cet astre.

Tyr, taureau. La lettre représente un taureau qui fouille la terre avec ses cornes.

Biarkan, bouleau.

Lagur, liqueur, eau.

Madur, l’homme. La lettre représente un homme qui contemple le cours des astres, & leve les mains d’admiration.

Yr, arc tendu avec sa fleche. La lettre le représente assez bien.

Ce que nous venons de rapporter touchant l’alphabet runique ou islandois prouveroit qu’autrefois ces peuples avoient l’usage des lettres représentatives ou monogrammes, avant que de connoître les lettres alphabétiques.

Moesogothique.

On appelle Moeso-gothie, le royaume de Moesie, ou Mysie, situé entre le Danube, la Macédoine & l’Histrie, dans lequel les Visigoths ou Vestrogoths, c’est-à-dire, les Goths occidentaux qui étoient au-delà du Danube, vinrent s’établir avec la permission de l’empereur Valens, auquel ils promirent de l’aider contre les Huns, & même de se faire chrétiens, lorsqu’il leur auroit envoyé des docteurs qui les pussent instruire. Effectivement cet empereur leur envoya Ulphilas qui leur donna l’alphabet grec, & traduisit en langue gothique l’écriture sainte.

Anglo-Saxon.

On appelle Anglo-saxons, les peuples anglois qui habitoient la Saxe & qui passerent, l’an 449 de J. Chr. dans la grande-Bretagne, à laquelle ils donnerent le nom d’Angleterre, car auparavant elle s’appelloit Albion & Bretagne, ou Britannia. Ces anglois y porterent avec eux la langue allemande, & l’ancienne langue bretonne fut confinée dans le pays de Galles, où se retirerent les naturels du pays : cette ancienne langue bretonne ressemble au bas breton qui se parle dans la basse Bretagne, province de France. L’alphabet anglo-saxon n’est point différent de l’alphabet latin.

Illyrien ou Esclavon.

La langue illyrienne ou esclavonne se parle dans plus de soixante provinces différentes situées tant en Europe qu’en Asie, mais particulierement en Moscovie, Sclavonie, Dalmatie, Boheme, Pologne, Lithuanie, &c. Hongrie, Croatie, Carniole, Bulgarie, Prusse, Bosnie, Moldavie, Moravie, Silésie, &c.