Page:Encyclopedie Planches volume2.djvu/161

La bibliothèque libre.
Le texte de cette page a été corrigé et est conforme au fac-similé.
ALPHABETS ANCIENS. 9

naire de la vie, dans les lettres, &c. Cette derniere écriture a aussi ses majuscules qu’on a eu l’attention de mettre dans les planches.

Les Arméniens reconnoissent Haik, qui vivoit, dit-on, avant la destruction de Babel, pour le fondateur du royaume d’Arménie, & le premier qui ait parlé la langue haikaniene. Cet Haik eut un fils nommé Armenak. Wahé étoit le cinquante-troisieme & le dernier successeur d’Haik, il fut défait par Alexandre le grand, & ce royaume resta sous la domination des Macédoniens, jusqu’à ce qu’un certain arménien nommé Arschak, se revolta contre les Grecs du tems de Ptolémée Philadelphes, & fonda l’empire des Arsacides qui finit en la personne d’Artaschir, le 28 successeur d’Arschak. La langue haikaniene qui s’étoit conservée jusques-là dans son ancienne pureté, fut altérée par le mélange des Genthuniens, peuples du Canaan, des Bagratides & des Amatuniens, familles juives, des Medes, des Arsacides mêmes, qui étoient Parthes, des Arravielans, Alains de nation, des Chinois, &c. Jusqu’au 3e siécle les Arméniens n’eurent point de caracteres qui leur fussent propres, ils se servoient indifféremment de ceux des Grecs, des Perses & des Arabes ; un certain Miésrob, ministre & sécrétaire de Warazdate & d’Arsace IV. du nom, entreprit de leur donner un alphabet, à quoi il réussit. On fit une version de la bible & on traduisit divers livres, soit philosophiques, soit historiques des Grecs & des Syriens, ce qui fixa l’ancienne langue haikaniene qui cessa d’être vulgaire quelque tems après, & qu’on distingua de la vulgaire, en l’appellant langue littérale ; car depuis ce tems-là le royaume d’Arménie fut en proie aux Hagaréniens, aux Sarasins, aux Chorasmiens & aux Kalifes d’Egypte, enfin aux Tartares qui, sous la conduite de Tamerlan, sembloient devoir tout détruire ; ensorte que la langue en usage aujourd’hui dans l’Armenie est tellement éloignée de l’ancienne langue haikaniene qu’ils n’entendent plus cette derniere qu’à force d’étude, la vulgaire est pleine de mots arabes, turcs & persans, &c.

Malgré ce que nous venons de dire sur Miesrob, j’ajouterai ici qu’Angelus Roccha dans son discours sur la bibliotheque du vatican ; George, patriarche d’Alexandrie ; Sixtus Senensis, &c. reconnoissent saint Chrysostome pour l’auteur des écritures en langue arménienne, & pour l’inventeur des caracteres arméniens. Il est certain que saint Chrysostome fut banni de Constantinople par un édit de l’empereur, & qu’il alla finir ses jours dans l’Arménie ; il a pu donner aux Arméniens l’usage des lettres greques, que ces peuples n’auront quitté que pour prendre des lettres qui leur fussent propres.

PLANCHE XIV.
Géorgiens.

Les Géorgiens écrivent comme les Arméniens & comme nous de gauche à droite. Ils ont trois alphabets dont les caracteres se ressemblent peu. Le premier est des lettres sacrées majuscules ; le second est des lettres sacrées minuscules, lesquelles anciennement étoient admises pour majuscules dans l’écriture vulgaire, mais dont on ne se sert plus aujourd’hui. Enfin le troisiéme alphabet est des lettres vulgaires, aujourd’hui en usage parmi les Géorgiens, dont les majuscules sont les lettres majuscules sacrées du premier alphabet.

PLANCHES XV & XVI.
Ancien Persan.

Selon quelques écrivains, Dhohak, ancien roi

de Perse, inventa les anciennes lettres persannes que nous présentons ici dans les Planches XV & XVI. d’autres en font honneur à Feridoun son successeur ; mais toutes ces traditions paroissent fort incertaines. Au reste je ne pense point que ces caracteres soient les premiers qui ayent été en usage parmi les Persans, parce qu’ils n’ont aucune affinité avec les caracteres syriens & phéniciens, &c. ce qui devroit être, selon moi, pour constater leur ancienneté. Je dis plus, je crois que dans l’origine les peuples qui habitoient cette vaste contrée n’eurent point d’autres caracteres que ceux des Syriens ou Assyriens, puisque dans les tems les plus reculés on appelloit du nom de Syrie, non seulement le royaume qui porte encore aujourd’hui ce nom, mais aussi l’Arménie, la Perse & la plûpart des autres pays asiatiques que Sem avoit eus en partage.

La Planche XV. présente l’alphabet des Gaures ou adorateurs du feu ; cet alphabet est composé de trente neuf lettres, je le donne tel que le hasard me l’a offert dans les papiers de feu M. Pétis de la Croix mon prédécesseur ; j’y ai reconnu la main de l’illustre Pétis de la Croix, son pere, qui avoit séjourné l’espace de dix ans à Alep, à Ispahan & à Constantinople, & qui mourut à Paris en 1695.

La Planche XVI contient aussi l’alphabet de l’ancien persan, mais tel que les Anglois viennent de le publier dans la nouvelle édition du livre de Religione veterum persarum, du docteur Hyde ; ce dernier alphabet ne contient que 29 élémens. Je laisse au lecteur le soin de comparer ce dernier alphabet avec le premier, il y verra plusieurs différences considérables, par rapport à l’ordre, aux dénominations, &c. il ne m’appartient point de décider auquel de l’un ou de l’autre on doit donner la préférence ; j’en laisse le soin à un jeune voyageur françois arrivé depuis peu des Indes & de Bassora, où il a résidé quelques années, & où il s’est appliqué particulierement à l’étude de l’ancien persan ; j’apprends qu’il n’est pas toujours de l’avis du docteur Hyde ; peut-être donnera-t-il la préférence au nôtre. J’ai ajouté au bas de cette XVI Planche le commencement du prétendu livre de Zoroastre, que le chevalier d’Ashvood a fait calquer fidelement sur l’original qui se trouve dans la bibliotheque bodlienne, & qu’il envoya à Messieurs Fourmont.

Grandan.

Outre les voyelles initiales, tous les alphabets indiens ont des voyelles plus abrégées qu’ils joignent avec les consonnes. L’alphabet grandan que nous présentons ici en manque, parce que l’on a négligé à Pondicheri de les marquer : cependant nous n’avons pas cru devoir omettre cet alphabet tel qu’il est, pour completer le plus qu’il nous a été possible le nombre des alphabets indiens, & dans l’espérance que par la suite quelqu’un se trouvera à portée de lui donner la perfection qu’il n’a pas.

PLANCHE XVII.
Nagrou ou Hanscret.

Les caracteres nagrous appellés encore hanscrets, marates, guzurates & samscretans, sont les caracteres de la langue savante des brahmes, que ces religieux se font un scrupule de n’enseigner qu’à ceux qui se destinent à embrasser leur état. Ils s’écrivent de gauche à droite ; j’ai tracé cet alphabet en partie d’après celui du P. Henri Roth, gravé dans la Chine illustrée de Kirchere, & en partie d’un manuscrit envoyé de Pondicheri, contenant quelques alphabets indiens, dont on avoit dessein de