Page:Encyclopedie Planches volume 3.djvu/143

La bibliothèque libre.
Cette page n’a pas encore été corrigée

lui conserver sa chaleur & sa fluidité. Les ringards qui forment la grille etant ôtés, on met le bouchage pour fermer la coulée; l'ouverture du devant des timpes au-dessus de la dame, se bouche avec de la braise tirée du fourneau, & des frasins mouillés, ce qui suffit pour empêcher la dissipation du vent; on tire alors la pelle pour donner l'eau à la roue, & laisser agir les soufflets.

Il est nécessaire que les mufles ou buses des soufflets soient éloignés de l'orifice intérieur de la thuyere au-moins de dix pouces dans les premiers huit jours, & qu'ils soient posés de maniere que leur vent se croise au centre du foyer. Les ouvrages en sable veulent être très-ménagés au commencement, c'est pourquoi il faut modérer le jeu des soufflets & les éloigner pour en augmenter par gradation le mouvement & l'action, lorsque l'on jugera que l'ouvrage est affermi & plombé, c'est-à-dire que sa surface est vitrifiée: les ouvrages en grès ou en pierre calcaire peuvent être plus brusqués.

Les soufflets ne sauroient être en trop bon ordre, bien scellés & huilés, munis de ressorts flexibles; ils doivent être posés horisontalement & parallélement à l'aire du creuset; il faut aussi que les balanciers e e de la vignette & même lettre dans les plans & profils, Planche I & II. soient chargés de maniere par un poids i i, que le volant soit entierement élevé lorsque la came de l'arbre vient rencontrer la basse-conde; il faut aussi que l'élévation de la caisse ne se fasse pas avec précipitation par un contrepoids trop pesant, qui retarderoit la pression suivante; enfin il faut que l'extrémité extérieure des balan-ciers ne tombe pas sur un corps sans réaction, parce que la secousse qui naîtroit du choc briseroit bientôt les volans, crémailleres, crochets, &c. c'est pourquoi il faut mettre sur le chapeau c d de la chaise de rechute f f une fascine ou ressort de bois qui en adoucisse le choc & le rende insensible.

Il est nécessaire que la pression des cames taillées en épicicloïdes soit égale & totale; totale afin que les soufflets expirent tout l'air contenu dans leur capacité; égale afin qu'un soufflet n'expire pas trop tôt, & que le vent ne soit point coupé, c'est-à-dire qu'il n'y ait point d'intervalle entre les deux expirations, ce qui seroit un défaut dans les fourneaux, parce que le courant d'air interrompu cause un refroidissement, & qu'une partie de l'expiration suivante est employée à rétablir la chaleur 2°. que la defflagration de la thuiere est plus à craindre dans ce moment: trois soufflets pareroient à cet accident; difficile à éviter avec certains soufflets; mais il faudroit un porte-vent commun aux trois soufflets, comme aux trompes décrites ci-devant, dont le souffle est continuel.

Depuis la premiere charge de minerai on augmente sur chacun de 25 liv. de mine, ou d'un demi conge, en sorte que la charge est de cinq conges, ou 125 liv de mine lorsque l'on tire la pelle pour mettre les soufflets en mouvement; on tient le fourneau à ce nombre pendant quatre charges; on augmente ensuite d'un conge par huit charges, jusqu'à ce qu'il en ait pris huit; alors on n'augmente plus que l'on ne s'apperçoive que le fourneau peut en soutenir davantage, ce que l'on connoît aisément par la couleur de la flamme, la consistence des laictiers & la qualité de la fonte.

Il faut en genéral tenir en fonte grise un fourneau au commencement d'un fondage, ne lui donner de mine qu'à proportion que la chaleur augmente. Au bout de douze à quinze jours un fourneau bien construit & bien conduit est en état de porter toute la proportion de mine relative à la charge de charbon qu'il peut contenir, proportion qui peut cependant varier à cause des différens états & qualités du charbon.

Une charge est composée des matériaux qui doivent opérer & subir les effets de la digestion; car on peut comparer un fourneau à un estomac, les charbons qui contiennent le principe actif en est la base, son volume est fixé à 5 rasses ou vans, pesant ensemble environ 130 liv. le poids & le volume des autres matieres qui composent la charge, est contenu dans la table suivante.

Nombre. Especes. Poids Poids de Poids total

                particulier. chaque charge. d'une coulée.
 5 Rasses de charbon.. 46 liv...  230 liv... 2070 liv.
10 Conges de minerai.. 50 ......  500....    4500
 1 Conge de castine... 50........  50.......  450
 ½ Conge d'herbue .... 20........  20 ......  180
                                  800        7200

La castine est toute substance calcaire non saturée d'a-cides que l'on ajoute pour absorber les parties sulphureuses du minerai & servir de correctif, lorsque par un premier degré de feu elle est calcinée. Cette chaux, unie à l'acide, forme, à l'aide de la chaleur excessive qu'- elle rencontre plus bas, à mesure que les charges se consomment, un foye de soufre qui accélere la fusion des parties métalliques, & en s'unissant aux cendres vitrifiées des charbons, forme une substance vitreuse qui perfectionne la fusion, couvre le metal en bain, & par-là le préserve de la trop grande ardeur du feu; c'est cette couche de matiere vitrifiée en fusion, que l'on nomme laictier, à-travers de laquelle le métal se filtre à sur & mesure qu'il distille, le laictier s'assimile les parties hétérogenes, & laisse passer les gouttes de métal dans le bain qu'il recouvre.

Si la castine contenoit un acide outre qu'elle ne pourroit remplir l'office d'absorbant, elle pervertiroit plutôt le métal que de le corriger: on emploie avec succès la marne, la craie, les testacées fossiles, le gravier de riviere; ce dernier est le plus commode de tous par la facilité de s'en procurer & par son état de comminution; car il ne faut pas se servir de castine dont les morceaux soient en gros volume, parce que les gros morceaux de castine contiennent dans leur intérieur de l'humidité qui étant rarefiée par la chaleur, fait une explosion qui dérange l'ordre des charges qui ne peut être trop paisible.

L'argille ou herbue est une terre onctueuse mêlée à la terre animale & végétale très-atténuée. Elle est charriée par les eaux. On l'emploie pour conserver & défendre les parois de la trop grande ardeur du feu: elle est fusible & se répand sur toute la surface des parois en forme d'un vernis noirâtre, ce qui empêche le minerai de s'y attacher; elle fournit aussi une portion de phlogistique.

Voici l'ordre qu'il faut observer dans l'administration des charges; lorsque la bécasse ou jauge X X, au bas de la X. Planche de cette section, entre de toute sa longueur, qui est de 36 pouces, dans le fourneau, on jette trois rasses de charbon, ensuite un demi-conge de castine, & par-dessus deux rasses de charbon, dont la derniere contient les plus menus, ceux qui ont passé dans les dents de la herse; on charge en dernier avec les plus menus pour remplir les vuides que les autres charbons laissent entr'eux, on les arrange de maniere qu'ils forment une surface unie & inclinée du côté des timpes d'environ 30 degrés, ou, ce qui revient au même, que cette surface des charbons soit à fleur des taques du côté de la rustine, qui est le côté du gueulard où est placé l'ouvrier, fig. 1. & à 7 pouces & demi environ du côté opposé, qui est le côté des timpes. Cette inclinaison de la surface des charbons est nécessaire, parce que la mine que l'on verse du côté de la rustine, faisant un poids considérable, surbaissera bientôt cette partie, & mettra le charbon de niveau; une pente trop rapide fait culbuter les charges, toute la mine se porte dans l'endroit le plus incliné.

Lorsque la charge est dressée, c'est-à-dire lorsque le feu en consommant les charges précédentes, a permis à la mine d'abaisser au niveau les charbons, on verse alors le reste de la castine dans le centre de la charge; cette méthode de la mettre en deux tems la mêle plus exactement: on brise ensuite l'herbue amoncelée de part & d'autre du gueulard pour y sécher, & on la fait couler dans le fourneau du côté de la thuiere & du côté du contre-vent où le feu est plus vif; on verse ensuite les dix conges de minerai du côté de la rustine, c'est ce que fait l'ouvrier, fig. 1: pour n'être point trompé dans le nombre des conges, il faut obliger les chargeurs d'avoir dans une tuile courbe ou autre chose équivalente, dix petites pierres afin qu'ils en déplacent une pour chaque conge qu'ils versent dans le fourneau. Il faut que la mine soit humectée de façon à ne pas mouiller la main, maisassez pour se soutenir en masse, ce qui l'empêche de cribler à-travers les charbons.

Pour que chaque charge se fasse avec toute l'attention