Page:Envers de la guerre - tome 2-1916-1918.djvu/143

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au Journal, une fois sa retraite prise. C’est effrayant ce que nous devenons vertueux. Mais va-t-on laisser en liberté les profiteurs et les prolongeurs de la guerre ? Leur crime est plus grand.

— Le 28. Nous partons, ma femme et moi, passer quelques jours chez Anatole France. Nous arrivons à Tours à midi. Anatole France nous attend au saut du train. Une auto nous emmène à la Béchellerie, à 4 kilomètres de Tours, commune de Saint-Cyr-sur-Loire, propriété que France a achetée en juin 1914.

Un marchand de confection de Tours, qui est du déjeuner, dit que l’énorme majorité, à Tours, veut la continuation de la guerre, à cause des salaires et des gains accrus, chez les ouvriers et les commerçants. La bourgeoisie, nourrie de journaux réactionnaires, est acquise à la guerre indéfinie. En somme, dit-il, le front seul est pacifiste.

L’après-midi s’écoule dans la bibliothèque, un pavillon isolé, dans le jardin. Il y a là le dessinateur Steinlen, sa fille, son gendre Ingelbrecht. L’entretien reprend sur la guerre. France est frappé par la déclaration de Wilson, qui ne veut pas traiter avec les Hohenzollern. Mais la traduction de ce document est-elle fidèle ? Le député socialiste Renaudel, dont le journal l’Humanité a publié le texte vrai de ce document, a protesté contre une falsification officielle. S’il dit vrai, quel audacieux empoisonnement de l’opinion !

Je signale la nouvelle prétention de l’Entente, de ne signer la paix qu’après que l’Allemagne aura évacué la Belgique et le Nord français. Qu’on y prenne garde : dans son désir de prolonger la guerre, l’Entente élève des prétentions nouvelles à mesure que l’ennemi semble céder sur les anciennes.

France est décourage aussi par la Note verbale