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Page:Erckmann–Chatrian — Histoire d’un paysan.djvu/145

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Histoire d’un paysan.

La lecture de la lettre de Michel au club Breton. (Page 148.)
La lecture de la lettre de Michel au club Breton. (Page 148.)

Et comme maître Jean craignait les suites du massacre, pour la liberté :

« Bah ! tout ça, voyez-vous, dit-il, c’est la fin de la comédie ! si les aristocrates avaient marché lentement, ils auraient pu faire durer leurs pensions sur la cassette encore dix, quinze et même vingt ans ; mais à cette heure l’affaire est lancée, elle est entre les officiers et les soldats ; il faut qu’on s’empoigne, et que les uns ou les autres y sautent ; les gentilshommes y sauteront ! Et, ma foi ! maître Leroux, pourvu que ce soit bientôt ! car je ne vous cache pas qu’un fusil sur l’épaule me conviendrait mieux que ce tablier sur les cuisses. »

Maître Jean riait et disait :

« Avec des idées pareilles tu n’auras pas ton fonds de boutique. Mais à la guerre comme à

la guerre ; je pense comme toi que les occasions de faire son chemin ne vont pas manquer à la jeunesse. Bouillé, qui vient de réussir son premier coup, voudra bien sûr conduire ses Allemands à Paris.

— Tant mieux ! cria Mouton, c’est le plus grand service qu’il puisse nous rendre. »

Le rappel s’étant mis à battre sur la place, il fallut sortir. Mouton nous reconduisit jusque sous les arbres, et nous serra la main, en nous chargeant de compliments pour ses amis et connaissances de Phalsbourg. Après cela, nous repartîmes, et il rentra dans sa boutique. Nous ne pensions pas avoir vu celui qui remplacerait un jour Lafayette, à la tête des gardes nationales de Paris !

Quelle drôle de chose que le monde, surtout