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Page:Erckmann-Chatrian — L'ami Fritz (1864).djvu/114

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L’AMI FRITZ.

ses bas troués, ses vieux jupons crasseux, ses culottes rapiécées, son linge filandreux. À tous les soupiraux apparaissaient des têtes branlantes, des bouches édentées, des nez et des mentons en carnaval : on aurait dit que ces gens arrivaient de Ninive, de Babylone, ou qu’ils étaient réchappes de la captivité d’Égypte, tant ils paraissaient vieux.

Les eaux grasses des ménages suintaient le long des murs, et, pour dire la vérité, cela ne sentait pas bon.

À la porte de la cour se trouvait un mendiant chrétien, assis sur ses deux jambes croisées ; il avait la barbe longue de trois semaines, toute grise, les cheveux plats, et les favoris en canon de pistolet ; c’était un ancien soldat de l’Empire : on l’appelait der Frantzoze[1].

Le vieux David demeurait au fond avec sa femme, la vieille Sourie, toute ronde et toute grasse, mais d’une graisse jaunâtre, les joues entourées de grosses rides en demi-cercle ; son nez était camard, ses yeux très-bruns, et sa bouche ornée de petites rides en étoile, comme un trou.

Elle portait un bandeau sur le front, selon la loi de Moïse, pour cacher ses cheveux, afin de ne pas

  1. Le Français.