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L’AMI FRITZ.

— Je ferai ce que je pourrai, dit la vieille, on ne peut pas en demander davantage. »

Kobus voyant alors sur la table deux gelinottes, un superbe brochet arrondi dans le cuveau, de petites truites pour la friture, un superbe pâté de foie gras, pensa que tout irait bien.

« C’est bon, c’est bon, fit-il en s’en allant, cela marchera, ha ! ha ! ha ! nous allons rire. »

Au lieu d’entrer dans la salle à manger ordinaire, il prit la petite allée à droite, et devant une haute porte il déposa son panier, mit une clef dans la serrure et ouvrit : c’était la chambre de gala des Kobus ; on ne dînait là que dans les grandes circonstances. Les persiennes des trois hautes fenêtres, au fond étaient fermées ; le jour grisâtre laissait voir dans l’ombre de vieux meubles, des fauteuils jaunes, une cheminée de marbre blanc, et, le long des murs, de grands cadres couverts de percale blanche.

Fritz ouvrit d’abord les fenêtres et poussa les persiennes pour donner de l’air.

Cette salle, boisée de vieux chêne, avait quelque chose de solennel et de digne ; on comprenait au premier coup d’œil, qu’on devait bien manger-là dedans de père en fils.

Fritz retira les voiles des portraits : c’étaient les portraits de Nicolas Kobus, conseiller à la cour