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L’AMI FRITZ.

nent l’air et que les canards aillent à l’eau ; il sera temps de les enfermer quand il y aura de l’herbe, et qu’elles iront tout déterrer au jardin. »

Sûzel s’empressa d’ouvrir, et Christel se mit à descendre la prairie, Fritz derrière lui. À cent pas de la rivière, et comme le terrain devenait humide, l’anabaptiste fit halte, et dit :

« Voyez, monsieur Kobus, depuis dix ans cette pente ne produisait que des osiers et des flèches d’eau, il y avait à peine de quoi paître une vache ; eh bien ! cet hiver, nous nous sommes mis à niveler, et maintenant toute l’eau suit sa pente à la rivière. Que le soleil donne quinze jours, ce sera sec, et nous sèmerons là ce que nous voudrons : du trèfle, du sainfoin, de la luzerne ; je vous réponds que le fourrage sera bon.

— Voilà ce que j’appelle une fameuse idée, dit Fritz.

— Oui, monsieur, mais il faut que je vous parle d’une autre chose ; quand nous reviendrons à la ferme, et que nous serons à l’endroit où la rivière fait un coude, je vous expliquerai cela, vous le comprendrez mieux. »

Ils continuèrent à se promener ainsi tout autour de la vallée jusque vers midi. Christel exposait à Kobus ses intentions.

« Ici, disait-il, je planterai des pommes de terre ;