Page:Erckmann-Chatrian - Histoire d’un conscrit de 1813.djvu/247

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nous donnait même des bals, on nous appelait les héros d’Iéna. Tu vas voir comme on nous aime ! Entrons où nous voudrons, partout on nous recevra comme des bienfaiteurs du pays ; c’est nous qui avons nommé leur électeur roi de Saxe, et nous lui avons aussi donné un bon morceau de la Pologne. » Tout à coup Zimmer s’arrêta devant une petite porte basse en s’écriant : « Tiens, c’est la brasserie du Mouton-d’Or ! La façade est sur l’autre rue, mais nous pouvons entrer par ici. Arrive ! » Je le suivis dans une espèce de conduit tortueux qui nous mena bientôt au fond d’une vieille cour entourée de hautes bâtisses en bousillage, avec de petites galeries vermoulues sous le pignon, et la girouette au-dessus, comme dans la rue du Fossé-des-Tanneurs, à Strasbourg. À droite, se trouvait la brasserie : on découvrait les cuves cerclées de fer sur les poutres sombres, des tas de houblon et d’orge déjà bouillis, et dans un coin, une grande roue à manivelle, où galopait un chien énorme, pour pomper la bière à tous les étages. Le cliquetis des verres et des cruches d’étain s’entendait dans une salle à droite, donnant sur la rue de Tilly, et, sous les fenêtres de cette salle, s’ouvrait une cave profonde où retentissait