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Le brigadier Frédéric.

la justice, courbe-toi sous la loi que tu as acceptée !… Et comme des millions d’autres, tu as aussi donné le droit à cet homme de faire la guerre ; il l’a faite !… Il t’a joué, toi, ton pays, ta famille, ton bien, celui de tous les Français, dans l’intérêt de sa dynastie, sans s’inquiéter de rien, sans réfléchir ni prendre de précautions ; il a perdu… Paye et tais-toi !… Ne reproche pas à l’Éternel ta propre bêtise et ton injustice ; frappe-toi la poitrine et supporte ton iniquité ! »

Voilà ce que je pense.

Que les autres profitent de mon exemple ; qu’ils nomment toujours d’honnêtes gens pour les représenter ; que l’honnêteté, le désintéressement et le patriotisme passent avant tout le reste ; les gens trop fins sont souvent malhonnêtes, et les gens trop hardis, qui ne craignent pas de crier contre les lois, sont aussi capables de les renverser et de mettre leur volonté à la place.

C’est le meilleur conseil qu’on puisse donner aux Français ; s’ils en profitent, tout ira bien, nous reprendrons nos frontières ; s’ils n’en profitent pas, ce qui est arrivé aux Alsaciens et aux Lorrains leur arrivera province par province ; ils s’en repentiront, mais il sera trop tard.