Page:Ernest Cœurderoy - Hurrah !!!.djvu/143

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formité d’aspect sont bien les signes distinctifs de la Mort aux lèvres froides !


II.   Ce cadavre est là, sous la main. Il cherche à m’effrayer avec ses yeux ternes, ses dents serrées, son odeur putride et l’acier des baïonnettes qui brille dans ses cheveux. Mais je ne suis pas de ces écrivains mendiants qui ont peur de la Vérité, qui ont peur de la Mort. Je sais ce que c’est qu’un cadavre, et qu’on peut l’étudier en chantant. Tout ce que je me rappelle des bancs de l’École, c’est qu’ils sont de sapin et flamberont bien quelque jour. J’ai fondu le fer de mon scalpel en une plume tranchante. Les morts sont les moules des vivants. Disséquons les morts !

Je déchirerai le linceul écarlate qui recouvre le cadavre de l’Occident, je ferai voir sa corruption sanieuse.

...... Un passé glorieux renversé sur des débris d’autels et des cadavres de rois. — les anciennes institutions emportées dans la tourmente de révolutions si formidables que la bourgeoisie voudrait en effacer jusqu’au souvenir : — un avenir gros de misères, de révolutions, de guerre et de naufrages dans lequel l’Ordre actuel s’engloutira.

Et pour le présent, des pouvoirs méprisés, assis sur des pointes de sabres, les pieds dans le sang : misérables panaches de grandes époques ; — le choc meurtrier de tous les intérêts ; — l’industrie brisant les hommes dans ses rouages immenses, distribuant l’indigestion aux uns et la fringale aux autres, rendant en pluie de sang la sueur du pauvre qui la fait prospérer ; — des populations d’ouvriers tassés dans de grands centres industriels et moissonnés épisodiquement par la Mort ; — la concurrence homicide, la soif du gain, l’exploitation du travail, le morcellement de la terre poussés à l’impossible ; — la ruine, la grève, la mendicité, la répression, la correction, la