Page:Ernest Cœurderoy - Hurrah !!!.djvu/316

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un cri s’élèvera ! — Le cri dernier, le plus inexorable de tous les cris, le cri des hommes que tord le Fringale : du pain !... — Et le pain manquera ! Et le pain, c’est la Vie ; le pain, c’est la raison suprême des révoltés ! !

Nos sociétés en arriveront là forcément quand la fièvre de la guerre et de la révolution sera calmée, quand la fatigue fera rougir leurs yeux, quand le besoin les mordra de sa cruelle dent. Alors, rien ne comprimera plus le cri de nos entrailles, car tout frein sera brisé, et les hommes fêteront la Liberté sainte, sur les cadavres encore chauds des anarchistes qui portaient des couronnes. Alors, l’Usure et l’Épargne seront rendues impossibles ; sur leur passé misérable les hommes auront étendu le manteau sanglant de la Guerre civile. La Révolution produira sur l’Océan des peuples ce que produit, sur le cours des fleuves, la crue soudaine de leurs eaux. Et de même que les pierres et le limon viennent à la surface des flots débordés et se mêlent à l’écume, de même les ressources, monopoles et capitaux mis en réserve jadis reparaîtront forcément, et forcément seront dispersés parmi les masses d’hommes en effervescence qui les épuiseront au jour le jour.


XVII.   Dans cette extrémité, tout contrat ayant disparu, et les hommes ne pouvant cependant pas vivre sans conventions, il faudra refaire un contrat social. Ce contrat sera juste parce qu’il sera consenti par tous en face de la famine, à propos de l’aliment de première nécessité, dans une de ces heures menaçantes où les hommes sont forcément équitables, chacun ayant à conserver sur tous le plus extrême de ses droits, celui de l’estomac. Ce contrat sera durable parce qu’il reconstruira la société par ses assises, assurant tout d’abord les hommes contre les besoins les plus impérieux, et ne réglant que plus tard les autres rapports sociaux. Il sera naturel parce qu’il res-