Page:Ernest Cœurderoy - Hurrah !!!.djvu/359

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pondu : Je bâille et ne crois à rien ! Et les plus illustres des RRévolutionnaires, altérés par les derniers coups d’état des rois, m’ont répondu : Nous ne pouvons plus rien ; nous ne savons pas ressusciter les morts !...

Oh ! alors, alors ! j’ai frappé ma poitrine de mes deux mains et j’ai dit à mon cœur : Organe imbécile, tais-toi ! Aujourd’hui le sentiment est ridicule, et la pensée superflue ; les aspirations généreuses ne valent pas un centime au grand livre du doit et de l’avoir ! Puisqu’on ne parle aux hommes de ce temps qu’avec des voix métalliques, au roulement de l’or sur les comptoirs j’opposerai le bruit d’airain de mes prédictions.

Oh ! alors, alors ! j’ai compris que pour vaincre la contagion morale dont nos sociétés sont infectées, il fallait appeler sur elles la contagion physique, les fléaux et les famines. Car Bien et Mal, tout est forcément contagieux parmi les hommes contraints de vivre en société. Et parmi les contagions funestes, la Misère tue plus de monde que le Choléra ! Elle tue plus cruellement, plus lentement ! — Et nous savons les causes de la Misère ! Et nous sommes coupables quand nous la supportons.

Oh ! alors, alors ! j’ai juré que du soir au matin, par les larges rues, sur le seuil des magasins, des palais et des casernes, retentirait ma voix. Et qu’elle remplirait les bourgeois de terreur !

Alors, je me suis écrié : Périsse la France ! Périssent toutes les patries ! Ce ne sont après tout que des formes éphémères de sociétés. Mais vive l’Homme, la moins imparfaite et la plus récente des transformations universelles !

Et j’ai dit encore : Oh ! les hommes de ce temps, les hommes à bon marché et à petite valeur, les hommes accroupis sur le travail de la femme, ceux qui passent leur vie à balancer des comptes et à auner du ruban, les hommes qui n’ont jamais eu ni pensée propre ni parole