Page:Ernest Renan - Cantique des cantiques, Calmann-Levy, 1884.djvu/78

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preuve d’un goût si délicat, se soit à ce point oublié ? Ajoutons : 1o que le roi appelle la danseuse bath nadib, « fille de prince, » mot qui serait absurde adressé à la paysanne, tandis qu’au contraire nous l’avons trouvé, deux versets plus haut, appliqué aux gens du cortège de Salomon ; 2o que Salomon connaît depuis longtemps la femme à laquelle il parle, puisqu’il vante ses charmes les plus secrets (vii, 7) ; 3o enfin, que les compliments adressés à la Sulamite dans les autres parties du poëme ont un caractère absolument différent de ceux que nous lisons ici. Le passage que nous discutons est le seul où la sensualité orientale se donne pleine carrière, et où le traducteur soit obligé à des atténuations. Il est impossible d’admettre que Salomon, voyant la jeune bergère pour la première fois, lui tienne un langage qui ne peut être convenablement adressé qu’à une prostituée, et qui forme un contraste si frappant avec celui qu’il lui tient ailleurs.

Une seule hypothèse est donc possible, c’est que