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DE CHARLES DE L'ESCLUSE

Depuis que, par les soins de notre Languet, une amitié a été contractée entre nous, avec la reconnaissance que je lui dois, j’ai cultivé cette amitié avec respect et je la cultiverai toujours : je désire que tu veuilles bien très certainement te le persuader. C’est pourquoi si je pouvais être gratifié de quelque chose, une fois averti, tu reconnaîtrais en effet que je dis la vérité. Lorsque je partirai d’ici, j’examinerai de quelle façon nous nous servirons plus commodément des devoirs réciproques des lettres.

Le libraire français est revenu de Francfort : cependant il n’a pas apporté de lettres de Languet. Il dit qu’il a travaillé, à son grand péril, et qu’il a songé à abandonner Francfort ; il veut partir pour Strasbourg, afin d’être plus près de sa patrie. Bâle me plairait davantage ; mais il a peut-être ses raisons pour préférer Strasbourg à Bàle. Le Légat de la Moscovie est encore ici : pourquoi est-il venu ? Nous ne le savons pas encore.

Le mois précédent, j’ai reçu des lettres d’Ungnad[1] de Constantinople : son successeur doit y arriver aux Calendes de Janvier. Ungnad a songé à rester là-bas jusqu’au mois d’Avril, pour le mettre quelque peu au courant. Il écrit que le Persan est décédé, et d’autres annoncent qu’il est mort par le poison que lui a administré sa propre sœur, corrompue par l’Empereur des Turcs. Il était en effet, redoutable pour le Turc lui-même. Le Roi d’Espagne, par son Légat, se hâte de faire la paix avec le Tyran des Turcs, afin de pouvoir tourner toutes ses forces contre les Belges. Dieu nous conserve par sa clémence !

Adieu et porte-toi bien, illustre Craton. Je te prie de vouloir bien présenter mes salutations à ton si aimable fils Jean, à Scharve et à Monave. Dodoens te salue de nouveau et Aichholz me prie de te présenter ses salutations.

Vienne, 3 des Ides de Février 1578. Ton bien dévoué Car. Clusius.


  1. David Ungnad, ambassadeur de l’Empereur d’Autricbe auprès du Sultan.