58 FABLES D'ESOPE
Et ceste perte il estime venir Pour avoir faict au Serpent telle injure; Parquoy le prie après de revenir.
Le Serpent diet : « Mon amy, je te jure Qu'en ta maison tu ne me peulx tenir, Car je voy bien que tu serois parjure.
« Quant est du mal, diet le Serpent tressaige, Que tu m'as faict, je le veulx pardonner; Mais je ne veulx avec toy retourner. Je n'ay sy lasclie et débile couraige.
« Tu ne me peulx, après ton grand oultraige, Par ta promesse ou ta foy guerdonner ; Sy guerison je me puis bien donner, Le souvenir durera tout mon aage.
« Puis que tu m'as ja navré et blessé. Je ne veulx point adjouster foy aulcune. Car ton serment bien tost seroit froissé. »
Quand on remect toute hayne et rancune. C'est grand vertu d'ung vouloir bien dressé. Tel cueur vaillant n'est subject à fortune.
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