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paix et impatiente de reprendre le cours de ses affaires, les tendances inquiétantes des « Panthéonistes. » Il avait osé fermer le club. Il s’était également adressé à l’opinion pour la faire juge entre Babeuf et lui. Elle n’avait pas hésité : Babeuf était un spectre rouge en chair et en os, et son nom revenait souvent dans les bruits qui couraient de cataclysme social prochain, de bouleversements imminents. Le gouvernement s’était préparé à tenir ferme devant l’orage qui depuis longtemps s’annonçait. Certes sa police était çà et là pénétrée par celle de ses adversaires il était gêné par l’état d’une législation que l’on disait ultra-tyrannique et sous laquelle le bureau central de police n’avait pas même le droit d’arrêter un voleur. Il était souvent paralysé par l’infidélité de ses agents qui, connaissant par expérience les oscillations de sa politique, savaient qu’ils risquaient de tomber le lendemain sous la coupe de ceux contre lesquels ils étaient appelés à sévir aujourd’hui. Enfin il était divisé : les menées de Barras étaient connues des autres Directeurs ; ils étaient obligés de ce côté à des précautions qui pouvaient devenir à un moment donné de terribles entraves. Mais Carnot était alors président du Directoire et, le 14 germinal, Cochon de Lapparent, républicain résolu et avisé, avait été appelé au ministère de la police. Un rapport d’un de ses agents disait le 15 floréal : « L’indolence de toutes les classes des inspecteurs est accablante ; c’est à l’action soutenue et vigoureuse du gouvernement à leur souffler une âme[1]. » Le nouveau ministre était bien propre à leur souffler cette âme. Les conjurés de leur côté manquaient de fonds. Ils n’ont jamais eu, dit Buonarroti, plus de 250 francs disponibles. Rossignol avait 20 francs pour faire des largesses au peuple. Ils étaient de plus travaillés par

  1. Schmidt, Tableau de Paris, t. III, p. 179.