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électorales des départements. » On laissa Barras favoriser l’évasion de Drouet que sa popularité rendait gênant, mais on se servit de sa présence sur la liste des contumaces pour déférer le jugement de tous les accusés à une Haute cour dont le siège fut fixé à Vendôme.

Un tel procès, à Paris, eût pu créer des embarras. La police eut beaucoup à faire dans les semaines qui suivirent l’arrestation des conjurés pour déjouer les efforts tentés en vue de leur délivrance et pour contenir les Jacobins surexcités. De volumineux rapports témoignent à cette date de son activité et de l’ébullition du personnel révolutionnaire. Barras du reste n’avait pas renoncé à renverser ses collègues. Au moment même où les accusés arrivaient à Vendôme, éclata l’échauffourée du camp de Grenelle. On sait que plusieurs centaines de « démocrates » se présentèrent aux troupes campées à Grenelle dans la nuit du 9 au 10 septembre 1796, en les invitant à fraterniser avec eux et à se joindre à eux pour rétablir la Constitution de 1793. On sait que ces démocrates furent accueillis à coups de fusil et que ceux qui furent saisis furent jugés sommairement, puis exécutés. Ainsi périrent l’ex-conventionnel Javogues et Bertrand, ancien maire de Lyon. Tallien et Fréron, amis de Barras, qui avaient été reconnus parmi les groupes insurgés, s’enfuirent précipitamment aussitôt après leur échec. Pendant cette nuit, « Barras, qui avait alors la police dans ses attributions, était à la campagne, ainsi que Rewbell, qui passa la nuit à Arcueil. La Reveillère-Lépeaux déclare dans ses mémoires qu’il envoya un messager à Barras, mais qu’on frappa longtemps et inutilement à la porte du Directeur, qui le lendemain affirma n’avoir rien entendu, parce qu’il dormait profondément[1]. » Et en effet nous avons sur sa

  1. M. Robiquet Babeuf et Barras, Revue de Paris, mars 1896.