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tique ; de même, son essai de réalisation par la force resta stérile. Ce fut, pour les principautés protestantes d’Allemagne, une sorte de fièvre de croissance, une crise de formation rapidement surmontée. En fin de compte, le résultat de ces mouvements tumultueux, en Allemagne, fut le passage de la grande propriété des mains du clergé féodal à celles des seigneurs laïques. Si la situation générale du peuple fut améliorée, ce fut par le progrès naturel des moyens de production, de l’administration et de la richesse publiques, et les convulsions de l’anabaptisme en Allemagne, les guerres religieuses en France retardèrent ce progrès au lieu de l’accélérer.

Pendant un siècle et demi, le socialisme platonicien ou chrétien n’eut plus d’écho que dans les œuvres de Campanella, de Bossuet, de Fénelon. Campanella compte sur l’avènement prochain d’un siècle d’or et d’une République céleste, qui annonceront la fin du monde. C’est encore un millénaire. Sa Cité du soleil imite à la fois l’Utopie de Morus et la République de Platon. Elle est destinée à préparer le retour du, Unum ovile et unus pastor ! Bossuet et Fénelon croient avec tous les théoriciens de la politique du xviie siècle à un état de nature, état de liberté et d’égalité absolues, état d’innocence et de bonheur, fondement d’un droit naturel, type biblique et chrétien d’organisation sociale. Rousseau les suit ; il annonce une nouvelle période qui occupe la seconde moitié du xviiie siècle et comprend la crise révolutionnaire de 1789 à 1797.


4° LE SOCIALISME ET LA RÉVOLUTION DE 1789


Le théisme de Rousseau n’est pas très différent de celui le Morus. De l’existence d’un Dieu juste et de celle