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Page:Espronceda - L’Étudiant de Salamanque, trad. Foulché-Delbosc, 1893.djvu/52

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puis se regardèrent entre eux
et le désignèrent de nouveau ;
et les mains gauches enlacées,
d’un geste de doute et d’effroi
le contemplant, et leurs mains droites étendues
avec étonnement vers l’audacieux mortel,
s’approchèrent lentement
et l’entourant, inclinèrent
leur tête desséchée, dont la grimace
immobile et ironique, indiquait la crainte.

Et alors la vision voilée de blanc au fier Montemar tendit une main : un contact de glace lui fit crisper les nerfs et il essaya en vain d’y résister audacieusement :

tout son sang coagulé en une masse glacée transmet à son cœur une sensation galvanique, cruelle, nerveuse et froide, hystérique et horrible…

Malgré elle et maudissant le ciel, Montemar retira sa main, et, téméraire, la portant à son voile qu’il tira vers lui, il lui découvrit la face.

C’est son époux !! clamèrent les échos, c’est m’épouse qui a trouvé enfin son mari !! Les spectres crièrent avec joie : C’est l’époux de soif éternel amour !!

Et elle cria alors : Mon époux !! Et (désenchantement fatal ! triste vérité !) la blanche dame à l’élégante allure était un squelette sordide, horrible !…

Aussitôt, un seigneur aux éperons dorés, de belle prestance, quoique le visage fût d’une pâleur mortelle, la poitrine percée d’un grand coup d’épée, du sang coulant encore de son cœur,

s’approche et dit, en lui tendant la main que Montemar serre impassible : « La parole que vous donnâtes est enfin tenue : voyez, doña Elvire est désormais votre épouse :