— Ma mère !… où suis-je ? encor nul soleil ne se lève :
Hier je me souviens (n’est-ce pas, c’est un rêve),
Que l’on m’enveloppait dans un étroit manteau :
J’aurais voulu crier : mais ma bouche muette
Ne pouvait ; puis après dans mon ame inquiette
Tintait le bruit d’un lourd marteau.
Des pas !… je les connais : on marche sur ma tête.
Je me souviens encor ( mais je crois qu’on s’arrête)
Qu’Héralde, mon amant, qui me tenait de près,
M’avait dit : Si sans moi tu descends dans la tombe,
Ô mon unique amour, j’irai quand le jour tombe
M’agenouiller sous ton cyprès.
J’ai froid : entre ces draps que je suis mal à l’aise !
Je ne puis remuer : ce lit si dur me blesse :
J’entends sur le bois neuf filtrer des gouttes d’eau :
Où suis-je donc enfin !… Oh ! je respire à peine,
Car je sens sur mon sein dans la nuit avec peine
Plomber un énorme fardeau.
Si j’étais… Non, d’effroi l’ame à cette pensée
Se soulève : au trépas si j’étais fiancée,
Si… Dieu ! tomber vivante au fond de cet écueil !
N’avoir plus que mes bras à ronger ! ô nature !
Entendre remuer, disputant leur pâture,
Les vers autour de mon cercueil !