Page:Esquiros - Les Hirondelles, 1834.djvu/200

La bibliothèque libre.
Le texte de cette page a été corrigé et est conforme au fac-similé.
— 194 —

Disait un pauvre aveugle assis sous un grand chêne,
Il avait pour appui la borne du chemin ;
Son chien l’avait conduit vers l’église prochaine,
Et des hivers glacés le vent qui se déchaîne
Rougissait sa tremblante main.

Une vierge passa ; de sa noire mantille
Sa main laissa glisser une pièce d’argent ;
Il dit : Dieu vous conserve un père, jeune fille !
La vierge répondit : Je n’ai pas de famille ! —
Et baissa la tête, en songeant.

Alors, la nuit posa son pied sur la colline ;
La dame qui sortait de l’église à tâton,
Pria le bon vieillard d’entrer sous sa chaumine,
Et lui, prenant le bras de la belle orpheline,
Marchait, courbé sur un bâton.

Au milieu du foyer l’étincelle scintille ;
Une lampe rougit la barbe du vieillard ;
Son hôte près du lit détache sa mantille,
Et verse, en souriant, un vin blanc qui pétille
Au fond d’une coupe sans art.