Page:Esquiros - Paris ou les sciences, tome 1.djvu/410

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servée, le crâne présente un volume considérable. Quelques artistes, entraînés à voir par les idées de Gall, ont, il est vrai, exagéré dans ces derniers temps les formes raisonnables et possibles de la nature. Le front qu’on donne à M. Victor Hugo, nom seulement sur ses charges, mais même sur ses portraits sérieux, ne serait pas devant la science le front d’un grand homme ; mais celui d’un hydrocéphale. Un cerveau enflé à ce point ne contiendrait pas du génie ; mais de l’eau[1]. Le poète, Dieu merci ! n’a pas la tête construite sur ces dimensions extravagantes et maladives. Son front d’un beau style, bien ouvert, haut, sans excès, décrit une légère inclinaison en arrière qui est surtout visible de profil. En science, le front n’est d’ailleurs pas cette partie découverte de cheveux qui surmonte la figure ; de beaux développemens des lobes antérieurs du cerveau s’étendent quelquefois sous la végétation qui les couvre. Qui ne devine chez M. Léon Gozlan de vastes contours dissimulés par l’épaisse forêt de cheveux noirs, qui ombragent toute sa figure ? Souvent le siège de la pensée se plaît à se couvrir ainsi d’un voile : le talent aurait-il donc sa pudeur comme la beauté ? Le docteur Gall voulait voir une intention morale dans le soin que prend la nature de découvrir avec les an-

  1. Si ce n’est pas le crane d’un hydrocéphale, c’est au moins celui d’un enfant ; les enfans ont, en effet, comme au sait, la masse du front beaucoup plus considérable que celle des hommes faits. Tout en prévenant les artistes contre ces exagérations dangereuses, nous ne saurions d’ailleurs passer sous silence le concours imposant que leur témoignage apporte au système de Gall. Laissons les médecins couper, mesurer, pointer. Les artistes ont une seconde vue qui juge mieux des formes, et un compas qui ne trompe guère, le compas du génie.