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Page:Esquiros - Paris ou les sciences, tome 2.djvu/12

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DE L’HALLUCINATION.

cin assiste dans le plus grand nombre de cas, témoin triste et impuissant, à un désordre qu’il n’est point au pouvoir de l’homme de réparer. Le penseur trouve un attrait mêlé d’amertume dans la contemplation de ces infirmités morales que la main de Dieu semble couvrir à dessein d’un voile impénétrable. Une curiosité inquiète et grave, unie à une compassion immense, nous entraîne comme malgré nous sur le bord de cet abîme où s’agitent toutes les calamités de l’esprit, et d’où sortent des accens de colère, des plaintes et des gémissemens.

Entre la raison et la folie, existe un phénomène mitoyen par lequel il me semble à propos d’aborder l’étude des maladies de l’esprit : ce phénomène est l’hallucination. Jouet des erreurs de la fantaisie, l’halluciné sent autrement que les autres hommes ; il voit tout-à-coup ce que les yeux des autres ne voient pas, il entend ce que les oreilles n’entendent pas, il touche ce que les mains ne sauraient toucher. Dans cet état de choses, le monde réel est renversé. Jouet de ses sensations maladives, l’halluciné assiste à une existence qui n’est plus qu’une fable. Séquestré le plus souvent dans un établissement d’aliénés, il peuple cette solitude des fantômes de son délire. Autour de lui, les idées s’animent, prennent une forme ; des images dont l’existence est si vivement accusée à ses yeux, qu’elles masquent la présence de tous les objets réels, se montrent à son cerveau ébloui. Certes, une telle calamité mérite qu’on s’y arrête et qu’on l’envisage sérieusement. Ce n’est pas seulement la médecine, c’est la psychologie qui est intéressée à bien