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INTRODUCTION
VII

n’existe pas plus, en principe, que l’exactitude d’un instrument de précision dans les sciences physiques. Dans ces dernières, avant d’entreprendre aucune étude expérimentale, le savant s’applique tout d’abord à déterminer le signe et la valeur de l’erreur dont chacun de ses instruments entacherait ses conclusions. L’historien doit agir de même. La critique historique, c’est le calcul de l’erreur spécifique qui est propre à chaque document et dont il faut rigoureusement tenir compte dans toute recherche scientifique, c’est-à-dire sincère, de la vérité. — Cette critique est également nécessaire pour tous les documents relatifs à une même étude ; elle est également nécessaire pour toutes les études de science historique : je crois superflu d’y insister.

Tels sont les principes généraux que l’on a cru devoir appliquer ici en une étude purement critique consacrée à un point de l’histoire coloniale de la France. De tous les domaines de l’histoire moderne, l’histoire des colonies françaises a été assurément le plus longtemps délaissée par l’érudition. Des publicistes, des polygraphes, véritables flibustiers de l’histoire, s’y sont fait une réputation facile, en glanant, sans aucune critique, de quoi jeter au public des romans d’aventures passionnants ou des généralisations brillantes. Les vrais historiens n’ont guère osé s’y aventurer, ne pouvant rien entreprendre de sérieux dans ces domaines inconnus avant qu’ils n’eussent été défrichés par l’armée modeste et laborieuse des archivistes et des bibliographes. C’est à ces pionniers qu’incombe la première tâche ; elle est rude, elle est désintéressée, elle est sans