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CHAPITRE II


LES ANNÉES DE JEUNESSE :
LECONTE DE LISLE ÉTUDIANT À RENNES



I



Peu de temps après l’arrivée de Leconte de Lisle à Dinan, survint une longue lettre adressée par son père à M. Louis Leconte. Il est indispensable d’en citer au moins quelques passages. Outre que la sollicitude dont ils témoignent est fort touchante, ils éclairent d’un jour très vif le caractère du futur étudiant en droit.

M. Leconte de Lisle ne cachait pas la peine que lui avait causée le départ de son fils. « J’ai beau chercher à me faire une raison de son absence, écrivait-il, quand son souvenir me revient, et il me revient souvent, mes yeux se mouillent. Je me laisse volontiers pleurer. Puisses-tu, mon ami, n’être jamais obligé de te séparer de tes enfants à d’aussi immenses distances ; cela nuit au bonheur de la vie. » Puis, avec la minutie du père le plus attentif, il multipliait les recommandations que lui suggérait sa tendresse. « Mon premier désir est qu’il habite le quartier le plus aéré et par conséquent le plus sain… Il est peu difficile pour la nourriture quant à la pension, qu’elle soit saine, c’est tout ce qu’il lui faut. Sous ce rapport, il n’est pas sensuel. S’il était possible qu’une personne fût chargée de son linge (celle chez qui il logerait, par exemple), cela serait fort utile pour lui, car nul, que je sache, ne porte plus loin l’insouciance en pareille matière… Je n’ai pas le désir qu’il soit un fashionable, mais cependant je serais désobligé que sa mise ne fût pas soignée. Veuille, mon ami, y donner la main, sans permettre l’excès contraire, qui jusqu’ici