Page:Estève - Leconte de Lisle, Boivin.djvu/5

La bibliothèque libre.
Le texte de cette page a été corrigé et est conforme au fac-similé.

LECONTE DE LISLE
L’HOMME & L’ŒUVRE




CHAPITRE PREMIER


LES ORIGINES, L’ENFANCE ET L’ADOLESCENCE
DE LECONTE DE LISLE



I



Il existait vers la fin du xviie siècle, à Pontorson, en Normandie, sur les confins de la Bretagne, une famille de petite bourgeoisie dont les membres étaient, de père en fils, apothicaires, chirurgiens ou médecins. L’un d’eux, Michel Le Conte, sieur de Préval — un apothicaire celui-là — épousa la fille d’un contrôleur aux recettes foraines, François Estienne, sieur de Lisle. Ces « noms pompeux, » comme eût dit Molière, ne doivent pas faire illusion. Ce n’étaient pas des titres de noblesse, mais de simples surnoms empruntés à des terres très roturières pour distinguer entre eux les nombreux enfants des familles bourgeoises de ce temps-là. L’Isle, ou plus exactement l’Isle-Saint-Samson, était une ferme sise dans la commune actuelle de Pleine-Fougères, département d’Ille-et-Vilaine, arrondissement de Saint-Malo. À la mort de François Estienne, elle passa à sa fille et à son gendre. Le fils de ceux-ci, Jacques-François-Michel, sieur de Préval, se fit recevoir docteur en médecine et s’installa à Avranches, qui est à quelques lieues de Pontorson. Des douze enfants qu’il eut, l’aîné, Charles-Marie, né en 1759, que l’on appela Leconte de Lisle, émigra de Normandie en Bretagne, s’établit comme apothicaire à Dinan, s’y maria avec la fille d’un ancien négociant et échevin de la ville, Guillemette-Louise Bertin, et y mourut en 1809,