Page:Etienne-Gabriel Morelly - Code De La Nature.djvu/90

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ceur, la modération, une humble modestie, la patience, ne leur étaient pas moins fortement enjointes envers tous les hommes. Ces vrais humains étaient encouragés à remplir ces devoirs par des promesses de récompenses infinies ; des menaces terribles les empêchaient de s’en écarter : aussi, dans les premiers temps, les sectateurs de cette belle morale l’observaient-ils avec une exactitude admirable : leurs repas communs, dans lesquels les riches pourvoyaient abondamment aux nécessités du pauvre, avec lequel ils s’asseyaient à la même table ; des sommes immenses mises en dépôt entre les mains des pasteurs, par ceux qui, se dépouillant de leurs biens, se mettaient eux-mêmes au rang des mendiants ; toute cette conduite tendait visiblement à rappeler chez les hommes les vraies lois de la nature. Ainsi le christianisme, à ne le considérer que comme institution humaine, était la plus parfaite. Les persécutions soutinrent l’héroïsme de ceux qui l’embrassèrent ; leur constance, la pureté de leurs mœurs, leur firent plus de prosélytes, persuadèrent mieux que leurs dogmes mystérieux. La crainte de céder aux tourments peupla les déserts d’habitants qui vivaient du fruit commun de leurs travaux, et qui seraient devenus des peuples nombreux, s’ils ne se fussent fait un mérite de ne point laisser de postérité qui pût hériter de leur vertu.



Pourquoi l’esprit du christianisme ne s’est point soutenu.


Mais ce même christianisme avait des maximes, des pratiques, qui tôt ou tard devaient faire languir celles de sa morale. La vie même la plus détachée des affections terrestres, pour se livrer à la contemplation, devait dégénérer en inaction pour la société, et servir souvent de prétexte à la paresse : c’est ce qui arriva effectivement. Le